G.H.C. Bulletin 94 : Juin 1997 Page 1993

Louis Adolphe ROLLIN (1836 - 1909)

     Voici  ce passage :  "Puisque les colonies tendent de 
plus  en plus vers le " self government  ",  puisque  dans 
l'intérêt  de leurs caisses départementales ou municipales 
elles frappent,  sous forme d'octroi de mer,  les produits 
français de taxes élevées, il est juste qu'elles demandent 
plus au contribuable français de concourir dans une  aussi 
grande proportion au payement de leurs dépenses"
 (l'octroi de mer existe depuis mars 1868)

     "L'honorable  rapporteur  ne craint pas de  présenter 
les  tendances  des colonies vers le " self  government  " 
comme un acheminement vers des idées séparatistes".  
     "Nous  déclarons  hautement,  pas plus  aux  Antilles 
qu'au Sénégal, qu'à la Guyane et qu'à la Réunion les idées 
séparatistes n'ont jamais eu cours".  
     "Les  voeux que nous sommes chargés de présenter  par 
nos  commettants en sont,  du reste,  la  preuve.  Ils  se 
résument  en une demande d'assimilation aussi complète que 
possible  avec  les départements français,  et  sont  loin 
d'être  entachés de l'esprit que semble leur attribuer  M. 
le rapporteur".
  
Nostalgie ou problèmes dans la gestion de ses affaires ?
(3)

     Après  moins d'un an de présence  à  l'Assemblée,  le 
jeune  député dépose deux congés (3 mois et 2 mois) sur le 
bureau du Président.  Le 6 Février, sans revenir en Métro- 
pole,  il  présente sa démission.  Voici le contenu de  sa 
lettre :  
" Basse-Terre le 6 Février 1873  
Monsieur le Président  
L'état  de  mes affaires ne me permettant pas  de  remplir 
plus longtemps les fonctions de député,  j'ai l'honneur de 
vous  prier  de  présenter  à  l'Assemblée  Nationale   ma 
démission de représentant de la Guadeloupe.  
Veuillez agréer,  Monsieur le Président,  l'hommage de mon 
profond respect.  
Rollin député de la Guadeloupe".
  
     Durant  son bref séjour à l'assemblée,  a-t-il pu  se 
rendre  sur  les lieux de sa naissance  en  Moselle  ?  Ce 
retour  aux sources,  s'il a eu lieu,  a dû se faire  avec 
beaucoup  d'émotion,  surtout qu'il trouve sa terre natale 
occupée  par  l'armée allemande.  Il faut savoir  que  les 
habitants de Corny ont été tenaillés par deux choix insup- 
portables  :  le  premier,  rester  sur place et  se  voir 
imposer  la nationalité allemande,  le second,  garder  la 
nationalité  française avec I'obligation de s'en aller  en 
abandonnant  tout.  Nous ne savons pas quelle  option  les 
parents  de  Louis Adolphe ont  prise.  (Voir  "Corny-sur-
Moselle,  son  histoire"  par Mme M. J. Marchal,  page 19, 
conséquences du traité de Francfort du 10.05.1871)  

La période des démissions et des retours

     ROLLIN siégeant comme député avait chargé son premier 
adjoint MATHURIN d'assurer la fonction de maire.  Le maire 
des   Vieux-Habitants  reprend  ses  fonctions,   coup  de 
théâtre,  en 1875 et 1876, la commune reste sans maire. Il 
préparait  peut-être  une autre  campagne  électorale;  en 
effet il se présente comme candidat aux sénatoriales du  7 
février  1876,  les  premières qui se déroulent en  Guade- 
loupe.  Notre mosellan échoue de peu devant son adversaire 
le vicomte de LA JAILLE par 27 voix contre 29.  Nous avons 
beaucoup de mal à suivre cette série de va-et-vient;  a-t-
il  trop  de  charges  entre le  conseil  général  et  ses 
affaires ?  S'agit-il de sautes d'humeur ?  Car on apprend 
aussi  qu'il  démissionne  en  1882 de  la  présidence  du 
conseil général.  En effet,  de 1871 à 1893, ROLLIN a fait 
plus  de 9 allers et retours à la tête de  la  mairie  des 
Vieux-Habitants.

     Il  joue parfois les provocateurs et la commune reste 
sans  maire;  en 1883,  le gouverneur LAUGIER  dissout  le 
conseil  municipal  "pour  cause  d'hostilité  ouverte  et 
permanente vis à vis de l'administration supérieure de  la 
colonie  (en  particulier  le  fait  d'avoir  installé  un 
commissaire  de  police  adjoint à Vieux-Habitants  et  le 
refus  de  la  municipalité  de  régler  la  solde  de  ce 
fonctionnaire).  Notre lorrain se dit républicain, il n'en 
fait  souvent  qu'à  sa tête et joue  les  indispensables, 
malgré tout fragile,  puisque, lorsque sa femme meurt (4), 
il  démissionne de sa fonction de Maire.  Il est vrai  que 
la situation économique en cette fin des années 1880 reste 
très difficile.  Le Mosellan coincé entre la présidence de 
la chambre d'agriculture de Basse-Terre, parfois la prési- 
dence du conseil général, la mairie des Vieux-Habitants et 
ses  affaires  qui déclinaient,  tout cela  faisait  qu'il 
était souvent d'humeur inégale.  
Nous  retrouvons enfin la stabilité à la tête de la mairie 
des Vieux-Habitants de 1893 à 1905.  Télesphore BEAUGENDRE 
étant  maire,  cela  a duré 12 ans.  Malheureusement  nous 
assistons à l'accalmie avant la tempête.  

La tempête et fin de règne

     Les  élections  municipales se déroulent  en  octobre 
1905.  Deux listes s'affrontent,  celle du maire  sortant, 
BEAUGENDRE,  et celle de Louis Adolphe ROLLIN qui revient; 
il  est  remis de son veuvage (5).  L'enfant de  Corny  se 
présente  devant  les habitants avec sa  carte  de  visite 
politique,  sa  légion  d'honneur  et plus de  20  ans  au 
service des guadeloupéens.  

     La  fin  du règne de notre colon  d'origine  lorraine 
s'ouvrira sur une page sanglante :  Au moment du  dépouil- 
lement les passions ont du mal à se contenir.  M. LABIQUE, 
l'adjoint  au  maire sortant qui au cours de  la  campagne 
électorale  avait appelé à "barrer la route à  ROLLIN,  ce 
vieil argonaute" est très attentif.  
    Le dépouillement suit son cours et le succès de ROLLIN 
se fait jour,  LABIQUE explose et se précipite  au-dehors, 
où la foule attend le résultat du scrutin, il s'écrie :
"A moi, ROLLIN triomphe, c'est le retour à l'esclavage" et 
tire  un  coup  de  revolver  en  l'air,  auquel  d'autres 
répondent.  
"La confusion s'installe, les gendarmes essaient d'enfour- 
cher leur monture.  mais les brides ont été  sabotées.  La 
foule  envahit  le bureau de vote et  c'est  l'émeute,  la 
mairie est mise à sac et on relève de nombreux blessés."  

     M.  LABIQUE  à la tête d'un groupe de  mécontents  se 
rend  à  Marigot  où un affrontement se produit  avec  les 


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Révision 22/01/2005