G.H.C. Bulletin 87 : Novembre 1996 Page 1779
César Dominique DUNY
Là, toujours virulent, DUNY dénonce, dans nombre de
mémoires et de lettres destinés, notamment, aux commis-
saires de Saint-Domingue près la Convention, "les crimes
et forfaits" des commissaires civils en même temps que
"les machinations criminelles" de GENET, le ministre de
France, qu'il considère, à juste titre, comme leur
complice (DXXV/73, d. 732).
Le 28 août 1793, à New-York, alors qu'il dîne avec
TANGUY (sauf erreur : le journaliste TANGUY-LABOISSIèRE)
se présente un "baillif américain" pour arrêter ce dernier
à la demande du ministre de France. Pour avoir voulu s'y
opposer, DUNY est lui-même arrêté et incarcéré le soir
même (DXXV/73, d. 732).
Le 22 octobre, il est désigné par les habitants de
Saint-Domingue réfugiés à New-York pour se joindre aux
représentants déjà à Paris, qui sont "chargés de présenter
à la Législature française (...) les représentations et
les protestations des colons de Saint-Domingue bannis,
déportés, expatriés (...) contre POLVEREL, SONTHONAX et
DELPECH, ces délégués parjures (et) contre le ministre
plénipotentiaire GENET" (DXXV/73, d. 732).
En mars (?) 1794, avec quelques autres représentants
des Français réfugiés aux États-Unis, il s'embarque pour
la France sur le bateau "La Marie", affrêté à Philadelphie
par le général GALBAUD du FORT avec la caution de DUNY et
de plusieurs autres, GENET ayant refusé de mettre leur
voyage à la charge de l'Etat (DXXV/69, d. 693).
On sait que, incarcéré pendant sept mois à son arrivée
en France (GHC p. 1631), il s'y montre ensuite très actif
aux côtés, notamment, des commissaires PAGE et BRULLEY
(poursuivant de sa vindicte SONTHONAX et POLVEREL), mais
en butte à l'hostilité de "la faction jacobine, encore au
pouvoir", il est de nouveau incarcéré, peu après "ses
collègues de la délégation coloniale" (octobre-novembre
1795 ?), pour être libéré le 1er mars 1796.
Les renseignements qui suivent sont entièrement tirés
de l'ouvrage de G. Bruley. Ils ne sont pas toujours
précis, sans doute mériteraient-ils, dans certains cas,
d'être vérifiés ou précisés.
Lors de la nomination du général de HÉDOUVILLE comme
agent du Directoire à Saint-Domingue (août ? 1797), DUNY
obtient de faire partie de son état-major. Mais à la suite
du coup d'état "jacobin" du 18 fructidor An V (4 septembre
1797), cette place lui est refusée.
Après avoir refusé d'accompagner à Saint-Domingue le
mulâtre Julien RAIMOND, qui y est revenu (juin 1800) avec
la Commission envoyée par les Consuls, DUNY s'embarque le
2 mai 1800 à Bordeaux pour la Guadeloupe où, après maintes
péripéties qui le mènent à Lisbonne, Philadelphie, Saint-
Thomas, Saint-Jean (où il fait naufrage) et St-Barthélemy,
il arrive en février 1801. Mal reçu par "les agents direc-
toriaux persécuteurs et concussionnaires JEANNET et
BRESSEAU", qui protègent "les mulâtres ignorants et
féroces", il décide de rentrer en France, d'autant que le
capitaine-général LACROSSE, envoyé du Premier Consul,
souhaite qu'il se rende à Paris pour "donner des rensei-
gnements sur la situation de l'île".
Arrivé à Paris, via Lorient, à une date qui n'est pas
précisée mais avant le 23 juillet 1801, DUNY est présenté
par FORFAIT, ministre de la Marine à Bonaparte, qui lui
promet, dit-il, le poste de Secrétaire général de la
préfecture de la Guadeloupe. Il voit aussi LESCALLIER,
nommé Préfet colonial de la Guadeloupe, en compagnie
duquel il embarque à Brest le 24 octobre suivant.
Le 20 novembre 1801, en vue de la Guadeloupe, un
navire anglais leur apporte une lettre du capitaine-
général LACROSSE annonçant que le 23 octobre le mulâtre
PELAGE, "chef de brigade, ci-devant esclave de la Marti-
nique", s'est proclamé "chef du gouvernement, commandant
en chef de la force armée de la Guadeloupe et dépendances"
et que lui, LACROSSE, est à la Martinique. LESCALLIER et
DUNY s'y rendent donc pour apprendre que LACROSSE est
à la Dominique où ils le retrouvent "le lendemain".
Or, à l'annonce de la paix avec l'Angleterre, qui
doit permettre le retour de la Martinique à la France, les
habitants de cette île "manifestent une vive appréhension
en pensant que la colonie allait être soumise à la désas-
treuse législation qui avait ruiné les autres colonies
françaises des Antilles". Il importe donc de les rassurer
et DUNY est "chargé d'aller leur porter l'assurance que
rien ne sera changé dans la Constitution intérieure de
leur île". Il est accueilli "comme un Dieu". Et comme "il
importait d'instruire au plus vite le gouvernement consu-
laire de tous ces événements", DUNY en est encore chargé :
parti (de la Dominique ?) le 21 décembre 1801, il est à
Brest le 31 janvier 1802 et se rend aussitôt à Paris. A la
suite de quoi, le gouvernement décide d'envoyer à la
Guadeloupe le général RICHEPANSE avec 6.000 hommes de
troupe; affecté à son état-major, DUNY embarque avec lui
sur le "Redoutable", qui met à la voile le 31 mars 1802.
Après avoir pris le capitaine-général à la Dominique, on
débarque à la Guadeloupe "sous le feu des mulâtres et des
noirs".
Rapidement, DUNY se met à dos le général LACROSSE à
qui il reproche d'avoir constitué un corps de 600 noirs
pris dans les ateliers pour repousser une révolte dans la
commune de Sainte-Anne; de même que le général RICHEPANSE
dont il dénonce "le despotisme militaire". Prétendant
faire régner partout "la franchise et le désintéressement"
DUNY se décrit lui-même "comme un Argus incommode qui veut
qu'on fasse les affaires loyalement et honorablement". On
le tient donc "fort honnêtement éloigné du Conseil".
Enfin, après la mort de RICHEPANSE (3 septembre 1802), le
énéral MÉNARD, son remplaçant, trouve dans ses papiers une
lettre dans laquelle DUNY dénonçait "l'adresse et la
convoitise" de l'ancien chef d'état-major.
Après le départ de MÉNARD, puis de LACROSSE, remplacé
par l'amiral ERNOUF, "DUNY, de concert avec le préfet,
peut dès lors s'occuper des réformes qu'il avait rêvées et
se mit à traquer les fripons".
C'est alors, en juin 1803, que DUNY reçoit l'ordre de
se rendre à Curaçao. "Il s'agissait d'y régler certaines
difficultés occasionnées par un soulèvement des noirs
occasionné par le Directoire. La république b atave en
avait manifesté une légitime irritation"... DUNY s'emploie
aussi à o btenir des secours pour la ville de Jacmel, à
Saint-Domingue, cernée par les insurgés, et à "procurer
les premiers subsides aux colons français échappés au
farouche DESSALINES".
Là-dessus, les Anglais viennent assiéger Curaçao; à
la tête des résidents français armés par ses soins, DUNY
Page suivante
Retour au sommaire
Révision 28/12/2004