G.H.C. Bulletin 85 : Septembre 1996 Page 1707
La Guyane; aperçu géographique et historique
Répartition
La majorité des villes et des villages se trouve sur la
côte et près des estuaires des fleuves dont ils tirent
leur nom. Quelques villages se trouvent à l'intérieur sur
les fleuves (Maripasoula, sur le Maroni; Camopi, sur
l'Oyapock) ou près des placers (Saül, Boulanger).
Villes
Deux anciennes:
- Saint-Laurent, sous-préfecture (2.700 hab. en 1954;
14.000 hab. en 1994).
- Cayenne, préfecture. Site reconnu depuis le début du
XVIIème siècle. Elle fut détruite par un incendie en 1888
et reconstruite avec un plan en damier (13.500 hab. en
1954; 50.000 hab. en 1994). Les communes de l'agglomé-
ration ont progressé encore plus : Rémire-Montjoly : 6.773
hab. (+ 130 %); Matoury : 2.532 + 123 %) depuis 1954.
Une nouvelle :
- Kourou, avec le Centre spatial (7.000 hab. en 1982;
20.000 hab. en 1994).
II. APERCU HISTORIQUE
La Guyane est devenue française avant bien des provinces
de la métropole. Alors que le Roussillon l'a été en 1659,
Avignon en 1791, la Savoie en 1860, en Guyane la présence
française est attestée dès le début du XVIIème siècle.
Après le troisième voyage de Christophe COLOMB, qui
touche les bouches de l'Orénoque en 1498, Espagnols,
Hollandais, Portugais, Anglais (le plus célèbre étant Sir
Walter RALEIGH, qui vient en 1595) et Français font des
expéditions sur le plateau des Guyanes. Pourquoi ?
En raison d'une légende : ATABALIPA, frère du dernier
roi des Incas, ATAHUALPA, était venu cacher le trésor des
Incas dans le lac Parima, situé sur le plateau des
Guyanes, près des sources du Maroni. Dans la ville de
Manoa, encore plus belle que Cuzco, le roi se faisait
chaque jour, au lever du soleil, recouvrir de poudre d'or.
C'est "l'El Dorado". Le mot est lâché. Il enfiévrera
l'imagination de tous ceux que le mirage de l'or faisait
rêver. Mais il faudra attendre le XIXème siècle pour le
découvrir. Ces expéditions expliquent le partage du
plateau en cinq États.
Pour la Guyane française, quatre dates sont à retenir :
- 1604 - Expédition de LA RAVARDIèRE
Elle atteint l'embouchure de la rivière de Cayenne.
N'ayant pas trouvé d'or, l'explorateur repart au bout de
quelques mois.
- 1624 - Premiers essais de colonisation à Sinnamary
Vingt-six hommes venus de Rouen s'y installent. Parmi eux
se trouve Constant d'AUBIGNÉ, fils d'Agrippa, le poète des
Tragiques, et père de Mme de MAINTENON (elle y serait née
en 1625, et non en 1635 à Niort. cf. le livre du Dr. HENRY
"La Guyane, son Histoire, 1604-1946). Attaqués par les
Indiens, les colons se réfugient dans l'île de Cayenne et
construisent un fort sur le Mont Cépérou. Le site de la
ville était trouvé.
- 1643 - Expédition de PONCET de BRÉTIGNY
Organisée par la Compagnie du Cap Nord. Trois cents hommes
réoccupent le Cépérou. Des cases sont construites autour :
la ville naissait. Mais PONCET de BRÉTIGNY s'entendit mal
avec ses compagnons, provoqua l'hostilité des Indiens qui
le tuèrent et harcelèrent les Français. Ils partirent pour
le Surinam. C'était l'échec.
- 1664 - Compagnie de la France équinoxiale
Créée par COLBERT elle est chargée d'exploiter le pays.
Mille deux cents colons, sous la conduite de LEFEBVRE de
La BARRE, quittent La Rochelle et s'installent à Cayenne,
Matoury, Rémire, Kourou, Sinnamary, c'est-à-dire sur la
côte. Les Indiens se retirent à l'intérieur. Dès lors,
malgré les incursions des Anglais, des Hollandais et des
Portugais, qui s'emparèrent plusieurs fois du pays,
l'implantation française fut définitive. La mise en valeur
allait commencer.
Vers 1750, on compte 27.000 habitants, dont :
- Les Indiens (Amérindiens) : au nombre de 20.000, divisés
en une quinzaine de nations. Grâce à l'activité des
Jésuites, ils sont pour moitié christianisés, parlent
français et abandonnent la chasse et la pêche pour la
culture.
- Les colons, 1/7 de la population. Surtout Normands,
Alsaciens et Allemands. On trouve peu de femmes blanches,
à cause d'une croyance : elles ne pouvaient procréer que
des êtres chétifs et inintelligents sous les Tropiques !
D'où le métissage important avec les femmes noires.
- Les esclaves, 5/7 de la population, venus surtout du
Congo. Les arrivages sont peu fréquents, les négriers
préférant vendre le "bois d'ébène" aux Antilles, particu-
lièrement à Saint-Domingue. Leur vie, réglée par le Code
Noir de 1685, est très dure. Mais en raison de l'influence
des Jésuites et de la facilité de s'échapper des planta-
tions dans un pays vaste et boisé, leur sort est, semble-
t-il, meilleur qu'aux Antilles.
- Les hommes de couleur libres, 1/7 de la population. Ce
sont les esclaves affranchis. On les trouve à Cayenne
comme petits artisans et petits commerçants.
Les plantations des Jésuites (qui possèdent les 3/4
des terres défrichées) et des colons produisaient alors
sucre, café, coton, cacao, poivre, cannelle, muscade,
roucou, indigo. De plus, il y avait des vivres en quantité
suffisante pour nourrir la population. Mais rares furent
les planteurs qui firent fortune.
Le remise en cause de cette prospérité est due à deux
événements dont CHOISEUL, ministre de Louis XV, est
responsable.
- L'expulsion des Jésuites.
La compagnie de Jésus a été abolie en France en 1764. Ses
terres en Guyane furent vendues. Les Indiens retournèrent
à leur vie ancestrale et à leurs luttes intestines.
- L'expédition de Kourou (1763).
Elle eut trois causes :
1. compenser la perte du Canada, cédé aux Anglais par le
Traité de Paris.
2. occuper les terres enlevées aux Jésuites
3. prouver qu'une colonisation blanche (sans esclaves)
pouvait réussir sous les Tropiques.
Cette idée avait été émise par un colon habitant la Guyane
depuis 22 ans, BRULETOUT de PRÉFONTAINE. Dans son livre
"La Maison rustique", il préconisait l'arrivée de
cinquante familles aidées par l'État. L'idée fut reprise
par TURGOT, le frère du futur ministre de Louis XVI.
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Révision 28/12/2004