G.H.C. Bulletin 81 : Avril 1996 Page 1586
Un Saintois sur un trois-mâts coulé en 1917
Adrien-Victor Bride, fils de Zéphirin
Zéphirin BRIDE, né aux Saintes en 1884, embarqua le 7
mars 1917 sur le trois-mâts "Marthe et Marguerite" armé à
Nantes, jaugeant 525 tonnes. Le capitaine, Charles Louis
SAUTREL, était né au Havre en 1872 et le reste de l'équi-
page se composait de :
- Felix BERTELHOTE, né en 1879 à Chateauneuf,
- Guy SIVAGER, né en 1877 à Basse-Indre,
- Jules CHARRIER, né en 1883 à Noirmoutier,
- Jules BOCALY, né en 1885 à La Trinité,
- Albert DESPLANQUE, né en 1900 à Coutances,
- Gabriel BICHON, né en 1901 à Saint-Nazaire,
- Pierre HELARY, né en 1891 à Plouezel,
- Georges EVENO, né en 1901 à Nantes.
Voici les faits, à partir d'extraits du "rapport de
mer" du 5 novembre 1917, fait par le capitaine Charles
SAUTREL :
Le trois mâts avait quitté la petite rade de St-Nazaire le
12 septembre 1917 à 3 heures du soir et appareillé à 7
heures du soir à destination de Fort-de-France, la brise
étant favorable et fraîche de N.N.E.
Du 13 au 17, petite brise; aperçu deux quatre-mâts faisant
même route et rencontré une goélette. Le 18, coup de vent
de S.O. au S.S.O. en cape courante, mer très grosse, coups
de roulis très violents.
"Le 19 au lever du soleil, vers 6 heures, sauts de vent au
N.O., faible brise et calme, établi volants, perroquets et
brigantine, le navire roule passablement, cap au O.S.O.
Vers 2 heures 15 de l'après-midi, latitude 116°33 N,
longitude 12° Greenwich, aperçu un sous-marin se
présentant sous l'aspect d'un voilier à perte de vue par
2/4 à bâbord, distance 5 à 6 milles, temps très clair.
Presque aussitôt, un coup de canon, cru tiré à blanc,
suivi immédiatement d'un obus, passe au-dessus de la
mâture et tombe à 500 mètres du bord, à deux quarts par
tribord arrière puis le navire se trouve encadré par le
feu de l'ennemi qui tire avec deux pièces; de temps en
temps quelques schrapnels tombent autour de nous et très
près, on entend des chocs sur la coque.
Mis au poste de combat dès que le sous-marin fut reconnu,
mais nous fumes dans l'impossibilité complète de faire
usage de nos canons, d'abord le sous-marin se tenant à
bâbord devant et à une trop grande distance, 10.000 mètres
au moins.
De plus, nous étions presque encalminés et, le soleil se
trouvant presque devant à tribord, nous étions dans la
position la plus défavorable.
Un obus ayant atteint le rouf d'équipage, un autre venant
de traverser la coque de part en part, le moment étant
critique, décidé, d'un commun accord, d'abandonner le
navire, ce qui s'est passé dans le plus grand ordre,
l'équipage montrant beaucoup de calme et de sang-froid.
Il était à ce moment 2 heures 25.
Je m'estimais à 250 milles de la côte d'Espagne et 330 de
la pointe de Penmarch.
Fait diligence à l'aviron à la faveur des deux lames
S.S.O. et N.O. Il était temps : car obus et schrapnels
pleuvaient dru autour de nous et la mâture était atteinte
successivement dans ses parties hautes.
A 3 heures 25, le pauvre navire coulait après avoir essuyé
plus de cinquante coups de canons.
Je m'attendais à ce que le sous-marin vînt sur moi, il
n'en fut rien. Aussi, à la nuit, après avoir nagé pendant
5 heures environ, j'établis la voilure, une petite brise
fraîchissant de l'ouest.
Fait route à l'Est pendant deux jours, puis le S.S.E. pour
rallier la côte d'Espagne.
Le 22 à midi, je m'estime cent mille de la côte, vent
d'est, mer dure, nous sommes constamment mouillés.
Le soir à 6 heures environ, aperçu un vapeur, manoeuvré
pour lui couper la route; à 6 heures 45, nous fumes
recueillis; le vapeur était "L'amiral Troude", de la
Compagnie des Chargeurs Réunis, se rendant à Dakar; nous
étions exactement par 45° 21' N. et 7° 39' O., un peu plus
loin que je m'estimais.
A bord, nous reçûmes des soins empressés, des vêtements
secs; un bon repas et un bon gîte nous firent un bien
immense.
Pendant ces trois jours et quatre heures passés dans la
baleinière, nous avons souffert affreusement de l'humidité
et du froid, principalement la nuit car, en plus des
paquets de mer qui embarquaient, notre embarcation faisait
passablement d'eau et ce, à la suite d'un choc lors de la
mise à la mer.
Sans arrêt, jour et nuit, un homme a été occupé à vider
l'eau.
Le 23 vers 8 heures 30 du matin, la sirène de "l'Amiral
Troude" se fit entendre sinistrement : une torpille venait
d'être lancée par bâbord à 800 mètres environ; heureu-
sement, elle nous manqua, ne passant qu'à 20 mètres
environ de l'arrière.
Une fois encore, nous l'échappions. Personne n'avait vu le
périscope et le sous-marin ne se montra que 25 minutes
après, hors portée des canons et dans le soleil.
Navigué depuis sans encombre jusqu'à Dakar où nous avons
mouillé le 30 septembre 1917.
Tel est mon rapport que j'affirme sincère dans toute sa
teneur et que je me réserve d'amplifier si besoin est."
DEMANDE DE PHOTOCOPIES
Un lecteur nous demande des photocopies d'actes dont nous
avons donné les références en réponse à une de ses
questions. Nous sommes navrés mais il nous est tout à fait
impossible, par manque de temps, d'assurer ce service.
Nous signalons des références mais c'est à chacun, s'il
désire en avoir le texte intégral, d'aller consulter lui-
même les documents ou de faire venir les microfilms s'ils
sont microfilmés (c'est le cas de C/8).
Les microfilms des Archives d'Outre-mer (les fonds qui
étaient rue Oudinot et ceux de la série ancienne Colonies
qui étaient aux Archives nationales) sont à demander au
CAOM d'Aix-en-Provence (conditions d'expédition, voir GHC
p. 1531), responsable désormais de leur expédition au lieu
du CARAN.
Autre possibilité : vous déplacer pour consulter les
microfilms à Paris (CARAN) ou à Aix.
Dernière possibilité : vous adresser à un généalogiste
professionnel.
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Révision 28/12/2004