G.H.C. Bulletin 76 : Novembre 1995 Page 1460
Deux familles créoles :
Les DU BOURG de LA LOUBèRE
à Saint-Domingue;
Les SAINTE-MARIE à la Jamaïque
soeur Périne en 1802. Je n'ai aucun renseignement sur son
arrivée à la Jamaïque. L'historien Louis C. Malabre (dans
son livre "The French families of St. Domingue and
Jamaïca") déclare être pratiquement certain, mais sans
preuves, qu'il était né à Saint-Domingue. Comme rien
n'indique qu'il venait de France, il paraît, en effet,
tentant de penser qu'il venait comme sa femme de Saint-
Domingue et l'avait quitté au moment de la révolte. Mais
si Georges Quentin avait déclaré être né à Saint-Domingue,
il n'aurait plus été français après l'indépendance d'Haïti
en 1804. En déclarant faussement être né à Saint-Quentin,
il gardait la nationalité française. Peut-être aurait-il
choisi cette ville en pensant aux BRUSLÉ. La mère de
Louise Caroline était une BRUSLÉ. Or, on retrouve à Saint-
Quentin un Claude BRUSLÉ, marchand drapier ancien consul
échevin, vers 1750, un Quentin Nicolas BRUSLÉ vers 1770,
et son fils Quentin Henry BRUSLÉ en 1772.
A l'appui de cette hypothèse, il faut souligner le
paragraphe, relatif à la nationalité de Louise Caroline,
dans l'acte de dépôt des papiers de famille, effectué par
elle à Bordeaux en septembre 1835 :
"Attendu qu'il résulte des pièces produites que le sieur
Georges QUENTIN de SAINTE MARIE était natif de la ville de
Saint-Quentin en Picardie et avait, par conséquent, la
nationalité de Français,
"Que la demoiselle Louise Caroline DU BOURG était née dans
la ville du Cap, île d'Haïti, et par conséquent n'était
pas française le 12 août 1829, date de célébration de son
mariage devant le curé de l'Église catholique de Kingston,
île de la Jamaïque, avec ledit sieur QUENTIN,
"Que ledit acte de célébration de mariage entre un
Français et une étrangère fait en pays étranger, etc...".
Si l'on admet cette thèse, il est intéressant de
noter l'existence de plusieurs familles portant le nom de
SAINTE MARIE à Saint-Domingue avant la révolte :
- celle d'André Guillaume des HAYES de SAINTE MARIE,
avocat au Conseil Supérieur du Cap depuis 1764, nommé par
intérim lieutenant du Juge du Cap en août 1773, en rempla-
cement du sieur de SAINT MARTIN. Il était toujours
lieutenant civil et criminel du siège royal en 1780. Selon
MOREAU de SAINT MÉRY, il avait la réputation d'être
l'homme le plus cultivé de la ville. Il était propriétaire
d'une habitation dite "Sainte Marie" dans la paroisse du
Borgne, quartier du Bouquan-Champagne. Il avait épousé
Jeanne COURTIN le 18 mai 1782. Il mourut au Cap le 12
novembre 1783, dix-huit mois après son mariage et passe
pour n'avoir pas eu de descendance. Mais peut-être avait-
il des frères ?
On trouve également un SAINTE MARIE de LUZARNOYE,
lieutenant au régiment de Port-au-Prince, un chevalier de
SAINTE MARIE, sous-aide major au Régiment d'Angoumois, en
garnison à Saint-Marc. J'ai noté l'existence d'un SAINTE
MARIE, gardien des eaux du Cul-de-sac, plaine située au
nord de Port-au-Prince. On peut aussi noter la présence
des LÉAUMONT (ou LAUMONT), importante famille établie dans
le sud de l'île depuis 1725 dans la plaine des Cayes.
Plusieurs de ses membres jouèrent un rôle pendant la
Révolution au Club MASSIAC. Or, une famille SAINTE MARIE-
LAUMONT existait en France sous l'Ancien Régime, origi-
naire de Normandie (Sainte-Marie-Laumont se trouve à 13
km au nord de Vire).
Enfin, dans les minutes du notaire Martin (aux
Archives d'Outre-mer), j'ai découvert, en date du 18 mai
1724, l'acte d'achat à dame Marie RAMEAU, veuve de Quentin
LETOURNEAU, de la moitié d'une habitation aux Damassins.
L'acheteur était Joseph de SAINTE MARIE, habitant aux
Anses, dépendance du Fonds de l'Isle à Vaches. Il est
intéressant de noter à cette occasion un des prénoms du
cinquième enfant de Georges Quentin : Valentin Joseph
Henry. Le prénom de Joseph n'a plus été porté dans la
famille.
On peut émettre un deuxième ordre d'hypothèses : que
QUENTIN soit un nom patronymique et SAINTE MARIE un nom de
terre. Dans l'acte de dépôt des papiers de famille à
Bordeaux apparaissent les désignations "sieur Quentin",
"veuve Quentin", sans l'addition de SAINTE MARIE. En
revanche, Georges QUENTIN, dans l'acte de son mariage
catholique, avait bien déclaré simplement être fils de
Georges de SAINTE MARIE.
Je ne crois pas, personnellement, à cette piste.
Cependant, on trouve effectivement des QUENTIN à Saint-
Domingue. Une famille de ce nom était fixée aux Anses et
aux Coteaux. On en trouve aux Damassins et aux Cayes.
Il reste une autre énigme : l'âge réel de Georges
Quentin, par rapport à ses déclarations. S'il est effecti-
vement né en 1766, il aurait eu 39 ans au moment de sa
confirmation à Kingston ! Il aurait épousé à 42 ans Louise
Caroline, elle-même âgée de 17 ans...
Au moment de son mariage anglican (en juillet 1808),
Georges Quentin était planteur dans la paroisse de St.
Andrew, alors que Louise Caroline était de la paroisse de
Kingston. En 1816, l'almanach de la Jamaïque indique
Georges Quentin comme propriétaire d'une terre à Sainte-
Catherine. En 1823, cet almanach le donne comme proprié-
taire de deux plantations à Mount Carolina et à Richmond
Hill. Le 10 décembre 1826, il donne une procuration par
devant Me Smith, notaire. Il habitait toujours la paroisse
de Sainte-Catherine.
De 1809 à 1828, Georges Quentin et Louise Caroline
eurent six enfants. Et le 9 juin 1832, Georges Quentin
mourut à Mount Carolina où il fut enterré, avec ses
papiers de famille, veut notre tradition...
11. La venue en France des SAINTE MARIE
Trois ans après la mort de son mari, en 1835, Louise
Caroline quitta définitivement la Jamaïque pour Bordeaux
avec ses enfants Marie (14 ans), Valentin (12 ans) et
Louis (7 ans). Elle avait alors 44 ans. Elle s'établit 53
rue du Palais Gallien. En 1842 elle habitait 3 rue de la
Prévôté et y était encore en juin 1847. Son état de
fortune était très précaire et jusqu'à sa mort elle lutta
pour recueillir l'indemnité allouée aux colons de Saint-
Domingue. Elle mourut à Bordeaux, 64 rue des Remparts, le
23 avril 1861, jour de la Saint Georges. Elle avait 70
ans.
Les six enfants de Georges Quentin et de Louise
Caroline furent :
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