G.H.C. Numéro 66 : Décembre 1994 Page 1202
NOTES DE LECTURE
Hervé Morvan
Françoise Wagener, La reine Hortense
(Paris, Ed. Jean-Claude Lattès, 1992)
pages 36-37
"Nous le savons à travers les lettres très circonstanciées
qu'il envoie à Mme de RENAUDIN, l'année précédant son
mariage, il (il s'agit d'Alexandre de BEAUHARNAIS) a
commencé une liaison passionnée, en Bretagne, avec la
femme d'un officier de marine, de dix ans son aînée. En
vertu des hasards de la vie, ou de la petitesse du monde,
comme on voudra, Mme LEVASSOR de LATOUCHE de LONGPRÉ, née
Laure de GIRARDIN, se trouve être créole et parente de sa
future épouse (*). En 1779 il lui arrive trois choses :
elle met au monde un fils d'Alexandre, elle perd son mari,
et Beauharnais convole en justes noces. Mme de Longpré
n'entend aucunement renoncer à lui".
(*) "Mme de Longpré est doublement parente de Joséphine :
par les Girardin, alliés aux DES VERGERS en 1710 (ils se
traitent mutuellement d'oncle et de tante); par les
Latouche de Longpré, au neuvième degré, alliés, comme les
TASCHER, aux filles de Guillaume d'ORANGE".
page 38
"Alexandre s'est, enfin, embarqué le 21 décembre 1782. Il
a fait la traversée en compagnie d'une vieille connais-
sance, décidée, cette fois-ci à ne pas le laisser lui
échapper. Il s'agit, on l'aura compris, de Mme de Longpré,
qui va en Martinique régler la succession de son père".
page 41
"Mme de Longpré réussira un brillant remariage, ce qu'elle
souhaitait, avec le général comte DILLON. Elle en aura une
fille, Fanny, qui, ironie de l'histoire, le jour où elle
épousera (*) un dignitaire de l'empire, le général comte
BERTRAND, futur Grand Maréchal du Palais, le fera chez la
reine de Hollande, cette Hortense de Beauharnais qui
avait, par sa naissance, provoqué tant d'agitation dans
les vies de leurs deux mères".
(*) Fanny Dillon épouse en 1808, à Saint-Leu, chez la reine de
Hollande, le général comte Bertrand.
page 52
"C'est lui qui se charge d'aider la vicomtesse (*) à
réunir l'argent de leur passage aux Iles, et qui leur loue
une petite maison, au Havre, où elles attendront tout le
mois de juin 1788 leur embarquement sur un navire de
l'État. Revenant en septembre 1814 dans le grand port
normand, la reine Hortense reconnaîtra la maison sur le
quai, sa façade étroite, les deux fenêtres du salon où
leur hôtesse, Mme DUBUC - autre grand nom créole - se
souviendra, à son tour, l'avoir reçue enfant, accompagnée
de son excellente mère".
(*) Il s'agit de la vicomtesse de Beauharnais (la future
Impératrice Joséphine).
page 64
"Comme tous les Parisiens, Mme de Beauharnais tremble
(...). Dans le sillage de son mari, elle a suivi les
progrès des Constitutionnels et, au sein du faubourg St-
Germain, elle a vu naître et se fortifier l'esprit contre-
révolutionnaire. C'est précisément à cette mouvance
qu'appartient son amie, Mme de LAMOTHE-HOSTEN, créole
comme elle, qui lui a trouvé sa résidence actuelle, dans
l'hôtel qu'elle-même habite avec sa fille Désirée (*)".
(*) "On confond fréquemment cette amie de Mme de
Beauharnais avec sa belle-soeur et homonyme, Mme Hosten
-on prononçait "Hostain"- qui recevait rue Saint-Georges
(où, pour elle, l'architecte LEDOUX conçut un ensemble
résidentiel) une société notoirement contre-révolution-
naire. Cela lui vaudra d'être emprisonnée à Port-Libre
(Port-Royal). Sa fille, Pascalie, contemporaine et amie
d'Hortense, épousera un d'ARJUZON".
page 67
"Mme de Beauharnais est internée (*) aux Carmes où elle
retrouve non seulement son mari, mais bon nombre de ses
amis, à commencer par Mme de LAMOTHE-HOSTEN, sa fille, son
gendre, M. de CROISOEUIL, arrêtés à Croissy".
(*) Le 21 avril 1794, Mme de Beauharnais est arrêtée. Elle
retrouvera son mari aux Carmes.
page 73
L'aimable Désirée de Lamothe-Hosten, épouse de Jean-Henri
de Croisoeuil, a juste quinze ans. Elle paraît d'autant
plus touchante à ses compagnons qu'elle est enceinte".
page 90
"A ce noyau originel se joint bientôt la cousine germaine
d'Hortense, Emilie (*) de Beauharnais, fille de François,
"Beauharnais sans amendement", émigré, divorcé de son
épouse, Françoise, née Beauharnais, puisqu'elle était
fille de la comtesse Fanny, marraine d'Hortense. La mère
(**) d'Émilie, emprisonnée sous la Terreur et libérée
grâce à sa belle-soeur, la future Joséphine, à l'automne
1794, se remariera bientôt avec un indigène des Iles, M.
CASTAING - un "nègre", dira Bonaparte - et n'est pas en
mesure d'assurer l'éducation de sa fille".
(*) Émilie de Beauharnais (1781-1855) épousa en 1798
Antoine CHAMANS, comte de LA VALETTE (1769-1830).
(**) La mère d'Émilie, Françoise de Beauharnais (1757-
1822), épousa en premières noces (en 1778) François
marquis de LA FERTÉ-BEAUHARNAIS (1756-1846), frère aîné du
vicomte Alexandre de Beauharnais (époux de la future Impé-
ratrice Joséphine). Puis, Françoise de Beauharnais épouse,
en secondes noces (en 1794), Charles-Guillaume Castaing.
Ces renseignements généalogiques sont extraits du tableau
généalogique de la famille de Beauharnais (p. 448).
page 185
"Pour aumônier, Hortense a choisi M. d'OSMOND, évêque
concordataire de Nancy. Il appartient à une ancienne
famille de Normandie dont la branche cadette était passée
à Saint-Domingue. Sa mère, née CAVELIER de LA GARENNE,
était apparentée aux Tascher. C'était un homme d'esprit et
de bonne compagnie. L'une de ses nièces, fille du marquis
d'Osmond, son frère, Adèle, comtesse de BOYNE, s'illus-
trera comme l'une des plus fines têtes politiques de son
temps : elle a le même âge qu'Hortense et, comme elle,
deviendra l'amie de Mme RÉCAMIER".
page 186
"Le premier chambellan, Gabriel d'ARJUZON, fils d'un
fermier général, avait épousé Pascalie Hosten, dont la
mère et la tante avaient été de proches amies de la vicom-
tesse de Beauharnais, pendant la Terreur. Aux heures
noires de Croissy et des Carmes, les deux familles, d'ori-
gine créole, s'étaient épaulées. La cousine de Pascalie,
Désirée Hosten, cette jeune madame de Croisoeuil qui
attendrissait ses compagnons de captivité, bientôt veuve,
vivait à l'écart des nouvelles grandeurs des Beauharnais.
Lorsqu'elle mourra précocement, ceux-ci s'occuperont des
trois filles qu'elle laissera, dont la plus jeune,
Eugénie-Simplicie, était la filleule d'Hortense".