G.H.C. Numéro 52 : Septembre 1993 Page 867
Laissez les bons temps rouler
Ph. et B. Rossignol
Tout à commencé par un coup de téléphone impromptu à
René Thionville quelques heures avant notre départ pour la
Nouvelle Orléans; et quatre heures plus tard il était à
l'aéroport pour nous accueillir, nous donner un plan pour
atteindre l'hôtel où il nous avait réservé des chambres et
nous communiquer le programme des visites. L'organisation
américaine n'est pas un vain mot !
Que dire ensuite d'une semaine passée, trop vite, où
nous étions chaperonnés par René Thionville, dont le nom
de famille est bien connu des chercheurs guadeloupéens qui
font des recherches dans le notariat, Augusta Elmwood, qui
privilégie, grâce lui soit rendue, ses racines domin-
goises, et son mari Robert, sans oublier Paul Newfield qui
connaît tous les bas-fonds, pardon les hauts lieux, des
archives louisianaises ? Que dire de tout ce que nous
avons vu et de toutes les personnes que nous avons
rencontrées ?
La messe du 14 juillet (le dimanche 11) en français
avec, en introduction, la Marseillaise et l'hymne
américain, suivie de la visite du couvent des Ursulines
avec un guide passionnant et passionné (Robert Elmwood).
La bibliothèque de la Tulane University et son informa-
tique en consultation libre grâce à laquelle on peut
obtenir (et imprimer immédiatement) une bibliographie
complète sur un sujet ou un auteur (sans être "grand
maître informaticien"). Les archives notariales nous ont
impressionnés par les documents des hypothèques, tous
répertoriés, en accès public et... rapide. Les archives de
la ville de la Nouvelle Orléans sont microfilmées au fur
et à mesure et les microfilms sont vérifiés pour s'assurer
qu'il n'y a pas eu d'oublis et que la lisibilité est
bonne ! Un microordinateur est à la disposition des généa-
logistes pour consulter les bases de données des Mormons.
Tout ceci sans avoir à remplir des formulaires pour
accéder au Saint des Saints. En revanche il y a des
contrôles de sac à l'entrée et à la sortie.
A Lafayette, l'université était en plein débat sur
les budgets de l'année prochaine et une certaine fébrilité
régnait, ce qui ne nous a permis que d'avoir une idée des
nombreuses publications réalisées. Nous apprenons que la
bibliothèque Allen County (dans l'Indiana) recense tous
les articles de généalogie qui paraissent aux U.S.A. et au
Canada. Nous prendrons langue pour être répertoriés.
Enfin visite au R.P. Hebert, grand spécialiste des
Acadiens, mais qui a aussi publié 38 volumes de dépouil-
lements d'actes de la Nouvelle Orléans. On reste sans voix
et l'on regrette de ne pas avoir d'ancêtre louisianais !
Il faudra s'en procurer car nous avons trouvé de nombreux
amis et la réunion, chez Jan Barry, du groupe de St
Domingue de la Jefferson Genealogical Society, dirigée
d'une main de fer dans un gant de velours par Augusta
Elmwood, réunion à laquelle nous avons été invités, nous a
valu une avalanche de questions mais aussi combien de
chaleur et de promesses de coopération entre nos deux
associations.
M. Robert Gordon, président de la J.G.S. (lisez
Jefferson Genealogical Society) et qui descend d'une
famille de vieille noblesse française nous a fourni des
renseignements très utiles sur les bases de données généa-
logiques (il n'y a pas que les Mormons) consultables aux
U.S.A. et sur le minitel qui commence à se répandre. Une
voie à explorer...
Tout cela nous a laissé peu de temps pour les visites
touristiques : aquarium, zoo, bayous, plantations, musées
et le Vieux carré, dit aussi Quartier français, où les
noms des rues fleurent bon la royauté mais où les
habitants ne parlent plus guère français : la francophonie
a des terres à reconquérir et Napoléon n'a pas de quoi
être fier.
A Washington, un Monsieur rencontré dans la rue nous
emmène jusqu'à la section généalogie de la bibliothèque du
Congrès. Impressionnant ! L'informatique est reine et
l'accès est libre. Trop c'est trop et là où il faudrait
passer des jours nous ne disposons que d'une heure. Peu de
revues françaises répertoriées. Nous essayons de placer la
nôtre et de savoir comment consulter les catalogues infor-
matiques à partir de la France.
Enfin New York où nous sommes accueillis et pilotés
par Henry Hoff qui nous remet des exemplaires de divers
publications généalogiques américaines et un ensemble de
ses articles, sans oublier le plaisir d'un "repas
français" que nous apprécions. Nous regrettons de ne
n'avoir pu rencontrer James Dallett et Charles Loeber.
Une rapide visite à la New York Public Library qui
est abonnée à notre bulletin nous laisse, comme à
Washington, un sentiment de frustration et une furieuse
envie de revenir. Nous restons rêveurs devant les moyens
de la New York Genealogical and Biographical Society dont
Henry Hoff est un membre très actif :
Revenus pour 1991 : 517.902 $ (3.000.000 F)
Avoirs : 3.043.418 $ (18 millions !)
Bibliothèque possédant : 69.644 volumes, 22.917 manus-
crits, 2.751 bobines de microfilms, 7.681 microfiches.
Il est vrai que cette association a été créée en 1922,
mais nous en venons à regretter que les lois sur le
mécénat ne soient pas les mêmes en France et que nos
hommes politiques s'intéressent si peu à la culture et
plus particulièrement aux archives et à la généalogie. Les
Américains qui ont un problème d'intégration au moins
aussi complexe que le nôtre ne semblent pas considérer que
la recherche de ses racines soit un acte politique et ...
rétrograde.
Bien sûr tout n'est pas rose : l'entraide ne semble
pas fonctionner très fort, les prix demandés pour les
recherches généalogiques sont élevés (10 $ de l'heure
quelque soit le résultat) et la limite entre amateur et
professionnel semble floue; les bulletins des associations
ne sont pas d'une qualité supérieure aux nôtres et le
système de numérotation des généalogies descendantes nous
est resté assez hermétique. Enfin personne ne semble
connaître ni utiliser les sigles "internationaux".
Souhaitons que d'année en année nos rapports avec nos
"cousins d'Amérique" se développent; nous y avons, tous,
intérêt et amitiés à y gagner. Nous avons plusieurs
projets en cours à commencer par le développement de
l'entraide entre nos associations qui commence dans ce
bulletin.