G.H.C. Numéro 46 : Février 1993 Page 729
Villes et marchands antillais aux XVIIe
et XVIIIe siècles : le cas de la Guadeloupe (1)
commercent entre eux : en 1781, le petit port de Saint-
Eustache est victime de leur raid. Ceci provoque un exode
des marchands vers d'autres îles. MÉNARD se réfugie à
Basse-Terre en 1781. Il y remonte une affaire dont les
partenaires sont ces marchands protestants, aux noms
français ou anglo-saxons, de Saint-Thomas. Mais, au bout
de quelques années, les affaires de MÉNARD végètent : il
passera ainsi les vingt dernières années de sa vie vivant
de son office d'interprète de la langue anglaise pour le
port de Basse-Terre.
C'est que les déboires personnels assaillent MÉNARD
qui sombre dans la dépression et laisse ses affaires
partir à vau-l'eau. Un journal qu'il a tenu révèle la
cause de ce changement : une affaire de femme, tout un
petit roman. Une fille de joie l'a suivi de France,
paraît-il, en 1779, pour se faire épouser. Mais elle a
moins bien pris l'exil à Basse-Terre et a déserté le foyer
conjugal. MÉNARD en demeurera inconsolable, tout en ne se
faisant pas d'illusion sur son épouse volage.
Son inventaire révèle un autre aspect de sa person-
nalité : né en 1730, il a une bibliothèque de près de 200
livres qui représente la culture des années 1770-1780. Il
y a plus de livres en Guadeloupe qu'on ne le dit, et
particulièrement chez les négociants, mais une telle
bibliothèque semble tout de même exceptionnelle. Les
titres correspondent à la fois à la vie d'un négociant
("Traité des maladies vénériennes"), confronté aux milieux
protestants ("Histoire de la religion réformée"), et à la
fois à celle d'un homme intéressé par les romans à la mode
("Manon Lescaut") mais aussi par des idées assez engagées
pour l'époque (la somme anticolonialiste "Histoire philo-
sophique" de l'abbé Raynal) et toute la réflexion du
siècle des Lumières ("La grande encyclopédie").
En rapprochant ces ouvrages des Lumières, détenus par
un négociant de Basse-Terre à la fin du XVIIIe siècle, du
"Dictionnaire historique" qu'un marchand du début du
siècle faisait entrer en Guadeloupe, nous nous
souviendrons, pour conclure, des relations pas seulement
commerciales mais aussi, plus largement, culturelles et
idéologiques qui se sont instaurées, à travers les villes
portuaires et leurs négociants, entre les Iles au XVIIIe
siècle.
(1) A l'origine de ces propos, la causerie donnée lors de
l'Assemblée générale de décembre 1992. Nous en avons
conservé le tour familier. Pour un premier aperçu des
villes guadeloupéennes au XVIIIe siècle, voir "Commerce et
travail dans les villes coloniales des Lumières, Basse-
Terre et Pointe-à-Pitre, Guadeloupe" (Revue française
d'Histoire d'Outre-mer LXXV : 272 (1978) 31-78).
Les sources sur lesquelles ces propos s'appuient sont, en
particulier :
- Archives nationales :
Colonies E53 (BROCHON), E203 (GERMA), E5 (ANGERON)
- Centre des Archives d'Outre-mer, notariat :
Me Mollenthiel, 26 9 1786,
Me Castet, 28 2, 3 et 12 4, 3 5 1792 (ANGERON) .
- Archives départementales de Guadeloupe, notariat :
Me Dupuch, 22 frimaire IX (MÉNARD)
COOPÉRATION
de Michel Rateau : Faire-part à identifier TAILLEVIS de
JUPEAUX, p. 578
Adrien Gallet de Saint-Aurin indique comme deuxième épouse
du défunt une LAMBERTIE de LA RIGAUDIE : c'est une famille
périgourdine : de La RIGAUDIE seigneurs de LAMBERTIE et
autres lieux, dont Froidefond (armorial du Périgord)
indique qu'il a établi la filiation descendante depuis
1490. Armes : "d'argent à quatre fasces de gueules et une
bordure d'azur chargée de huit besants d'or".
de Michel Rateau : La Guadeloupe à l'ordre du jour de la
Convention (pages 682 et 702)
Voici l'ascendance de Pierre Louis CELORON de BLAINVILLE
d'après le "Dictionnaire généalogique des familles
canadiennes" de Tanguay :
1 Pierre Louis de CELORON de BLAINVILLE
2 Pierre Joseph de CELORON
b 29 12 1693 (5° de 7 enfants)
x Catherine EURY de La PERONELLE qui, veuve, entra en
1777 chez les soeurs grises de Montréal sous le nom
de soeur Marie Catherine EURRIE et mourut le 4 11
1797 à 74 ans.
4 Jean Baptiste CELORON sieur de BLAINVILLE, lieutenant
d'un détachement de la marine
b 1664
ax Hélène PICOTÉ, veuve d'Antoine de La FRAYNAYE, fille
de Pierre PICOTÉ de BELESTRE (+ Montréal 30 1 1679)
et Marie PARIS (b 1638 + 3 11 1684)
b 1656 + Montréal 23 11 1701
bx Geneviève DAMOURS + 24 3 1703
cx Gertrude LE GARDEUR
8 Antoine CELORON, conseiller du roi, arrivé à Lachine le
29 11 1686
x Marie REMY, de Saint-Sauveur
de Léo Elisabeth : La Guadeloupe à l'ordre du jour de la
Convention (pages 682 et 702)
Il faut ajouter d'autres sources :
- "Historique des troubles survenus à la Martinique
pendant la Révolution" de Pierre François Régis Dessalles,
publié par Henri de Frémont à la Société d'Histoire de la
Martinique (1982) : pour RIVIèRE, pp 341 à 428 et 458.
- "Aux Antilles sous la Révolution, marins français au
service de l'Espagne" in Annales des Antilles n° 12, 1965,
pp 41 à 90, qui contient :
1 Journal du comte de RIVIèRE du 12 mai 1791 au 24 août
1793 (année où il se met au service de l'Espagne)
2 Mémoire de MALLEVAULT de 1789 à 1793
de Dominique Budan de Russé : les FILLASSIER (p. 718)
Descendance métropolitaine de François Jérôme marquis de
BOUBERS (petit-fils de Jérôme Benjamin x Marie Anne
FILLASSIER, III 3.11) et Agnès de FOLARD, d'après, en
particulier, la généalogie LAURISTON par Bruno de Valbray
(1986, 22O F, B. de Valbray 72490 Livet-en-Saosnois). A la
disposition des personnes intéressées.