G.H.C. Numéro 39 : Juin 1992 Page 594
L'AFFRANCHISSEMENT D'ESCLAVES DANS LES COLONIES
FRANCAISES D'AMERIQUE
3.1 e)- titres et dénominations.
"Les titres de "sieur" et de "dame" étaient réservés aux
gens de condition libre. Un arrêt du conseil souverain de
la Martinique du 6 novembre 1781 interdisait de qualifier
les gens de couleur du titre de "sieur" et de "dame".
Cette disposition fut abrogée par l'arrêté du 12 novembre
1830 du Conseil Privé".
"La loi du 4 avril 1792 faisait de tous les hommes de
couleur libres des citoyens".
"Les titres de noblesse étaient intransmissibles aux
hommes de couleur libres en vertu de textes de 1704 et de
1777".
"Les affranchis étaient considérés comme "naturels
français", mais jusqu'en 1831 (arrêté du 1er avril 1831),
il leur fut interdit d'entrer sur le territoire conti-
nental de la France". En effet, en vertu d'un décret de
l'Assemblée Nationale en date du 28 septembre 1791 "tout
homme de couleur est libre en France" : le fait de toucher
le sol français à l'époque -France hexagonale- affran-
chissait ipso facto.
3.1 f)- héritage.
"Une déclaration royale en date du 5 février 1726, enre-
gistrée le 1er juillet 1726 au conseil souverain de la
Martinique, stipulait que le Roi de France déclarait nuls
les legs et donations de Blancs à des hommes de couleur
libres; tous les legs ainsi faits étaient confisqués par
l'Etat au profit de l'hôpital".
3.1 g)- exercice d'un métier; impôts.
"Une ordonnance locale de la Martinique du 3 janvier 1788
astreignait tous les hommes de couleur libres à prendre un
permis pour pouvoir travailler ailleurs que dans l'agri-
culture. Ces dispositions ont été abrogées en 1830".
"L'obligation de payer l'impôt sur les personnes, appelé
capitation, était établie comme suit :
- un règlement datant de 1671 de Monsieur de BAAS,
lieutenant général de la Martinique, exempte les Blancs du
paiement de la capitation;
- l'intendant de la Martinique, PATOULET, dans un compte-
rendu en date du 20 janvier 1683, mentionne le paiement
de la capitation par les hommes de couleur libres;
l'ordonnance locale du 11 juillet 1684 le prescrivait.
- mais, le Code Noir (1685) exempta les affranchis de ce
paiement.
Toutes ces mesures relatives à l'impôt furent abrogées par
un règlement de 1671, puis par une ordonnance royale de
mars 1685; ces mêmes abrogations furent annulées par une
ordonnance royale du 27 juillet 1724, qui prévoyait en
même temps la possibilité de ne pas procéder à son appli-
cation; ce fut le cas en Guadeloupe compte-tenu des
réactions négatives. En revanche, l'ordonnance royale du
27 juillet 1724 fut appliquée en Martinique : en consé-
quence, les hommes de couleur libres durent payer la
capitation en Martinique".
3.2 - Code Noir et affranchissement.
"On naît esclave quand sa mère est esclave, même si le
père est un homme libre. C'est la conséquence de l'adage
latin ventrem partus sequitur = le ventre est suivi par
(ses) parties -traduction littérale-. Cet adage s'est
imposé au cours des années 753 à 146 avant J.-C"
"Justinien, empereur romain du Bas-Empire, participe , à
l'époque, au mouvement général de simplification des
procédures d'affranchissement; il accorde immédiatement le
jus natalium, ce qui correspond à l'assimilation de
l'affranchi à un ingénu. Un ingénu est un "individu né
dans la liberté" ".
"En 1685, est écrite la "Grande Ordonnance" qui donna
naissance au Code Noir de Colbert, lui-même s'étant
inspiré des lois de Justinien".
Une étude du Code Noir, des lois de Justinien et des
conditions de l'affranchissement dans l'Empire romain,
pourra faire l'objet d'un autre article.
4 - Les sources documentaires utilisées.
Je cite ici les sources documentaires que j'ai pu
consulter pour réaliser cet article sur l'affranchissement
des esclaves dans les colonies françaises d'Amérique.
Ces sources documentaires, par leurs titres et par leur
contenu, complètent et précisent les informations synthé-
tiques que j'ai présentées.
4.1 - Les registres de l'état civil de plusieurs communes
de la Guadeloupe et de la Martinique.
4.2 - Bulletin des lois n° 175 (1ère section) 2ème partie
-ordonnances- pages 53, 54 et 55 : ordonnance du roi
sur les formalités à suivre pour les concessions d'affran-
chissement dans les colonies. Paris le 12 juillet 1832.
4.3 - Gazette et Journal officiel de la Martinique :
a) J.O. 4 et 11 1 1834 (p.1) : arrêté d'affranchissement
de Marie-Anne et de son fils Pierre FANFAN.
b) J.O. 15 1 1834, vol XVII, n°5 (p.1) : affranchissement
de Désirée épouse de JEAN-PHILIPPE.
c) J.O. 29 5 1833, vol. XVI, n° 43 : affranchissement
d'Estelle et de sa fille Marie JOSEPHE dite Méréide.
d) Vol. XVII n° 29 - 9, 16 et 23 4 1834; Vol. XVII, n° 88
-1 11 1834; Vol. XVII, n° 99 - 10 12 1834 : Affranchis-
sement de Joseph FONTELLINE.
e) J.O. 18 11834, vol. XVII, n° 6, (p.1) : arrêtés du
gouverneur (...) fixation des frais de publications et
impressions des déclarations d'affranchissement.
f) J.O. 1 2 1834 : avis relatif à l'ordonnance royale du 4
août 1833 prescrivant la déclaration de naissances, de
mariages et de décès d'esclaves (...) sous peine de
l'article 358 du code pénal.
4.4 - Ouvrages imprimés.
"Antilles 1789. La Révolution aux Caraïbes" de L. ABENON,
J. CAUNA et L. CHAULEAU, éditeur Nathan, 1989, 224 p.,
sources et bibliographie, 33 photos; pp. 147-162 (la
guerre civile en Martinique 1791-1793); pp. 195-200
(l'occupation anglaise de la Martinique 1794-1802).
"La Guadeloupe en ce temps-là" d'Alain GRILLON, éditions
Chaudet, 1983, 3 tomes, index général (patronymes et
autres), index iconographique, bibliographie.
"La condition juridique des affranchis en Martinique sous
l'Ancien Régime" thèse de doctorat de madame Christiane
MEZIN épouse DUVAL, université de droit, d'économie et de
sciences sociales de Paris II, 23 mai 1975.
4.5 - Bulletins G.H.C. n° 25, 30,31 et 32.