G.H.C. Numéro 39 : Juin 1992 Page 588

Famille SAINT QUANTIN ou de SAINT QUENTIN (Guyane)

dite  "Petit  Cayenne",  initialement vouée à  la  culture 
sucrière,  ensuite  à  celle  du  coton.  Cette  propriété 
comportant  130  esclaves fut vendue le 14  8  1817,  pour 
300.000 F,  à M.  BODIN-DESMOLAND.  Il est vrai qu'à cette 
époque Rose Thérèse de KERCKOVE,  mère de Madame de  SAINT 
QUANTIN,  vivait  encore,  et que cette dernière dut  éga- 
lement partager avec ses deux soeurs, Angélique CLERMOT et 
Marie-Thérèse ROBIN,  vivant toutes deux en métropole. Ils 
possédaient encore,  non loin de la précédente,  une autre 
habitation, de 86 esclaves, dite "Terre Rouge", héritée de 
Mme BESSE (Félicité d'AUDIFFREDY). Celle-ci sera vendue le 
25  4  1826,  pour 200.000 F,  à Melchior  Louis  BERNARD, 
ancien colonel d'artillerie.

     Le  couple  SAINT  QUANTIN résidait  à  Cayenne,  rue 
Dauphine,  et  fit l'acquisition de plusieurs  maisons  et 
terrains dans la ville même et en dehors de celle-ci, tels 
la maison dite de "l'ancien contrôle" qui jouxtait la leur 
et  un  terrain d'habitation situé au quartier du Tour  de 
l'île (25 5 1825).

    Mais il ne faut pas croire que cette prospérité  rela- 
tive était, pour Narcisse Isidore, synonyme de sérénité.
Il  connut  maints  déboires  et  désagréments.  Citons  : 
l'incendie de son habitation,  en 1832, au cours duquel il 
perdit  non seulement le logis principal,  mais "plusieurs 
cases à nègres, un mobilier important et une partie de son 
argenterie dont il n'a retrouvé que quelques lingots";  en 
1833,  "une barque qui portait des bois préparés pour  une 
nouvelle  maison  a coulé dans le  port";  en  1834,  "une 
épizootie a fait périr tout son bétail au nombre de trente 
têtes";  enfin,  en août 1836, "il a perdu en couches deux 
de ses meilleures négresses".

     A  tous  ces malheurs s'ajoutèrent parfois des  bles- 
sures  d'amour-propre.  Etant  en conflit  avec  M.  BODIN 
DESMOLANT,  acquéreur de "Petit Cayenne",  qui se montrait 
sans  doute  mauvais payeur,  il découvrit et  publia  une 
pièce selon laquelle ce notable guyanais,  chevalier de la 
Légion d'Honneur,  avait été "condamné aux fers" pour  une 
indélicatesse,  par un jugement du Tribunal de la Seine du 
29 Vendémiaire An VIII.  Or,  cette condamnation avait été 
ammnistiée  par une lettre de grâce du Roi,  le 8 10 1814. 
M.  de  SAINT QUANTIN se vit condamné,  tout juge de  paix 
qu'il était,  pour diffamation, après avoir fait connaître 
la pièce qu'il s'était procurée au Bureau de la Marine  de 
Brest.  Il dut verser,  comble de la disgrâce,  1.000 F de 
dommages et intérêts à son débiteur.

     Douze  ans plus tard,  il se vit au contraire  honoré 
par la remise,  à lui et à son épouse,  d'une médaille  de 
vermeil  pour  leur  participation à la lutte  contre  les 
épidémies de variole qui, depuis 1818, décimaient la popu- 
lation.  M. et Mme SAINT QUANTIN avaient, en effet, réussi 
(nous ne savons malheureusement pas grâce à quel  procédé) 
à  rapporter de métropole la précieuse vaccine  ou,  comme 
l'on  disait  alors,  le "fluide vaccin",  ce  qui  permit 
d'opérer  plus  de  4.000 vaccinations dans la colonie  et 
d'étendre  ce bénéfice aux colonies anglaises  et  hollan- 
daises  de Demerary et Surinam,  et de faire des envois de 
vaccin  frais  à la Martinique et  à  la  Guadeloupe.  Ils 
partagèrent  cette récompense avec les médecins  Caillard, 
Le  Bihan  et Pain.  Ces médailles portaient sur  la  face 
l'effigie   du  Roi  et  sur  le  revers  la  couronne  et 
l'enseigne circulaire,  avec inscription en relief, du nom 
des  impétrants.  Il eut aussi,  à la fin de  sa  vie,  le 
plaisir  de se voir restituer sa particule par un jugement 
du  Tribunal  d'Abbeville du 4 4 1837.  Il  mourut  un  an 
après, chevalier de Saint-Louis et de la Légion d'Honneur, 
dans sa maison de la rue Dauphine à Cayenne.  Sa femme lui 
survécut jusqu'au 15 1 1864;  étant née le 15 1 1780, elle 
vécut donc exactement 84 ans.


1.1.1.3.1 Auguste Edouard de SAINT QUANTIN

     Fils  aîné de Narcisse Eugène Isidore et de  Victoire 
d'AUDIFFREDY,  il naquit le 8 5 1802 à Paris,  vraisembla- 
blement  au  25  de la rue de Lancry,  derrière  la  Porte 
Saint-Martin,  où  la  famille de sa  mère  possédait  une 
maison.  Il  passa  son adolescence à Cayenne où il  était 
arrivé à l'âge de douze ans, puis revint en métropole pour 
compléter ses études.  A l'exemple de son père,  il  entra 
dans  la  Marine,  où nous le retrouvons avec  le  modeste 
grade de commis.  Il épousa, le 17 2 1829, Marie Elisabeth 
(dite  Malvina)  MALVIN,  fille de  Jean-Baptiste  MALVIN, 
habitant  propriétaire  et ancien capitaine  corsaire,  au 
temps de JEANNET OUDIN,  puis de Victor HUGUES. La future, 
selon  le  contrat  de mariage signé la  veille  chez  Me. 
Lemaître,  notaire à Cayenne, lui apportait en dot 3.200 F 
de meubles,  vêtements,  effets et bijoux,  ainsi que "son 
droit héréditaire sur la succession de son père, décédé le 
25  11 1825,  avec Madame sa mère,  dont la nature  et  la 
qualité seront déterminés en temps voulu".

     Cette  union  probablement fructueuse - car  l'ancien 
corsaire,  commandant  de quartier de  Tonnégrande,  avait 
accumulé  pas  mal  de biens - permit  à  Auguste  Edouard 
d'accéder à la situation de propriétaire,  puis de juge de 
paix  au décès de son père,  et finalement de colonel  des 
milices royales de Cayenne et conseiller municipal.

     De  ce  mariage  naquirent quatre  enfants  que  nous 
verrons à la troisième génération.

1.1.1.3.2 Marie Michel Ange Adolphe de SAINT QUANTIN

     Ce deuxième fils naquit,  lui aussi, à Paris, le 26 4 
1804 et mourut à Cayenne le 27 11 1850.  Il épousa, le 9 1 
1828, sa cousine issue de germain, Anne Félicité Augustine 
de  KERCKOVE,  née  le 21 12  1805,  de  Claude  François, 
officier  d'artillerie,  et  d'Antoinette  SENELLE.  Cette 
famille  était  fortunée et la fiancée apportait une  dot, 
elle aussi, conséquente.

     Etant,  comme  son aîné et son père,  entré dans  les 
services  administratifs  de la Marine,  Adolphe de  SAINT 
QUANTIN  fut  d'abord commis entretenu de 2ème  classe  au 
Sénégal,  puis  écrivain  de la Marine  à  Rochefort,  par 
décision du 10 8 1827,  pour se retrouver enfin habitant à 
Cayenne dont il fut conseiller colonial après son  mariage 
avec cette créole fortunée.




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