G.H.C. Numéro 39 : Juin 1992 Page 589
Famille SAINT QUANTIN ou de SAINT QUENTIN (Guyane)
Ce devait être un homme de caractère agréable
puisqu'en 1833 on opposait "au bouillant conseiller
CANDALE la sérénité d'Adolphe de SAINT QUANTIN et la
sagesse d'un VIDAL de LINGENDRE" (Extrait de l'ouvrage
d'Anne-Marie Bruleaux, R. Calmont et Serge Mam Lamfouck :
"Deux siècles d'esclavage en Guyane française").
En 1843, il fut à l'origine d'un projet d'émanci-
pation de la Guyane française, parallèlement avec Jules LE
CHEVALIER, en Martinique, TENAUX COMPANS et JOLY de
LOTBINIèRE, en France, et Henri SAUVAGE, en Guyane,.
Inquiets des bruits de prochaine abolition de l'esclavage
et redoutant la catastrophe économique que celle-ci ne
manquerait pas d'entraîner, ils préconisaient en Guyane
l'exploitation de 116.000 ha, étendus de la région de
l'Oyapock aux plaines de Kaw. Il libérait tous les
esclaves, mais les soumettait pendant quinze ans à un
règlement de travail établi par la compagnie avec le
concours du gouvernement. La croissance de l'économie
guyanaise serait assurée par le recrutement de nouveaux
travailleurs et l'achat de machines perfectionnées. Ce
projet entraîna l'enthousiasme de nombreux colons mais se
heurta à l'intransigeance de Schoelcher qui dénonça la
"mensongère émancipation des esclaves", la qualifiant de
"jonglerie". Le projet fut abandonné en 1846, alors
qu'Adolphe de SAINT QUANTIN devenait président du Conseil
colonial. Il mourut à Cayenne le 27 11 1850, père de six
enfants que nous verrons plus loin.
1.1.1.3.3 Marie François Narcisse Eugène de SAINT QUANTIN
Sur ce troisième fils de Narcisse Isidore, nous
possédons moins de renseignements. Il est vrai qu'il ne
vécut que 35 ans. Il naquit à Sarlat le 1 10 1806, où son
père avait été affecté comme contrôleur des Droits réunis.
Après une courte carrière d'avocat en métropole, il revint
à Cayenne et débuta dans la magistrature comme juge
bénévole. Il sera titularisé dans ses fonctions de subs-
titut du procureur en 1829. Conseiller à la Cour royale de
la Guyane le 1 7 1839, il deviendra procureur du roi à
Fort Royal (Fort de France) le 19 9 1840, où il mourra le
29 10 1841 sans, semble-t-il, avoir pris femme ni laissé
de descendant.
Il eut à intervenir à Cayenne en 1831 pour perqui-
sitionner à bord d'un navire négrier, la "Bonne Alice" de
Nantes, qui tentait de débarquer clandestinement un lot
d'esclaves dans la rivière de Mahury et le Canal Torcy.
Nous savons, en effet, que si l'esclavage ne devait être
aboli qu'en 1848, la traite des noirs, sous la pression
des Anglais, l'était depuis 1815.
1.1.1.3.4 Marie Joseph Alfred de SAINT QUANTIN
Né le 15 3 1810 à Saint-Flour (Cantal), le quatrième
fils de Narcisse Isidore de SAINT QUANTIN suivit la
carrière des armes. Sous-lieutenant du Génie à Metz le 6 8
1831, il servit à Cherbourg en 1837. Il embarqua pour
Cayenne le 29 1 1838 où il arriva le 17 mai suivant et fut
chargé de la direction des Ponts & Chaussées et du Service
du Génie jusqu'au 20 5 1857. Il fut en outre chargé de la
direction du Service de l'Artillerie en Guyane pendant
l'épidémie de fièvre jaune, par suite du décès du
directeur de cette arme.
En 1857 il fut désigné comme chef du Génie à
Versailles et termina sa carrière à Antibes comme
gouverneur militaire. Il fut fait chevalier de la Légion
d'Honneur le 14 4 1844, puis officier, le 12 6 1856.
Il avait épousé à Cayenne Victorine RONMY, fille d'un
officier du Génie devenu conseiller colonial et proprié-
taire de l'habitation le "Quartier général", située sur le
Canal Torcy. Celui-ci, Thomas Ferdinand RONMY, était le
gendre de Victor HUGUES, ancien gouverneur républicain de
la colonie (après avoir été celui de la Guadeloupe, où il
est resté célèbre pour sa féroce répression des Roya-
listes). Il en avait épousé la fille, Catherine Jeanne
Cornélie, le 18 8 1818. Sur son habitation, le futur beau-
père d'Alfred de SAINT QUANTIN eut à faire face à une
grave révolte d'esclaves réunis autour d'un certain Jean
Pierre. Au cours de cette révolte, M. RONMY fut frappé
dans ce qu'il avait de plus cher, son fils, âgé de six
ans, qui fut égorgé par le nègre TRICANDEAU.
On assistait ainsi à l'alliance du fils d'un ardent
Monarchiste avec la petite-fille d'un non moins ardent
Jacobin.
Alfred de SAINT QUANTIN était très attaché à sa
petite patrie dont il publié, à Antibes, une histoire,
suivie d'un recueil de contes et d'une grammaire créole.
Signalons également qu'il dessinait fort bien et que l'on
peut toujours voir, au Musée de Cayenne, des dessins de sa
main qui sont d'une grande finesse.
En 1850, il effectua, à bord du navire à vapeur le
"Crocodile", une reconnaissance vers le Para et les
bouches de l'Amazone, reprenant ainsi, cent vingt ans plus
tard, les explorations effectuées par son bisaïeul Jacques
Alexandre d'AUDIFFREDY. Dans un rapport de 24 pages, il
décrit les fortifications brésiliennes qu'il serait facile
de conquérir, les villes de Bélem et de Para. Il estime
regrettable de laisser de beaux monuments aux mains d'un
peuple "bâtard" qui a succédé aux premiers conquérants du
Brésil. Ce rapport fut considéré avec beaucoup d'intérêt
par le ministre de la Marine de l'époque, alors qu'on se
trouvait en plein litige avec le Brésil, au sujet des
territoires contestés entre Oyapock et Amazone.
De son mariage avec Victorine RONMY naquirent au
moins sept enfants sur lesquels nous reviendrons.
1.1.1.3.5 Jean Marie Louis Hippolyte de SAINT QUANTIN.
Ce cinquième fils naquit le 8 6 1814 à Paris. Comme
beaucoup de ses ancêtres et de ses parents proches, il
consacra sa vie au service de l'Etat, dans l'adminis-
tration de l'Enregistrement, où il termina conservateur
des Hypothèques.
Nous savons qu'il servit en Guadeloupe et à Saint-
Martin. c'est là qu'il connut sa future épouse, Caroline
DORMOY. Celle-ci était veuve d'un M. MAURRAS (peut-être
parent du futur leader de l'Action Française).