G.H.C. Numéro 31 : Octobre 1991 Page 416
LES AFFRES D'UNE DEBUTANTE
Claude Meissner
Dans l'épaisse frondaison de nos arbres généalo-
giques, se niche au plus profond la belle histoire, la
mystérieuse ou l'héroïque, celle-là justement que l'on se
transmet de génération en génération.
Qui n'a pas sa petite légende du terroir, son Oncle
d'Amérique ou son Cadet-l'Aventure ?
J'ai, moi aussi, reçu ma part de merveilleux et
d'imprécis. Je m'apprêtais à la transmettre à mon tour aux
générations suivantes ... mais les temps ont changé. On
réclame de la précision, le flou ne plaît plus guère.
Merveilleux ? Bon, d'accord, on est preneur, mais il faut
livrer le calibrage exact ! C'est ainsi que, pour fournir
des preuves, je me suis lancée dans la recherche généa-
logique.
Je ne savais pas qu'entrer dans la Recherche en
Généalogie, c'est comme entrer en religion : une fois
dedans, on n'en sort plus, on vit son désert et ses
ascèses, ses miracles et son chemin de croix.
On ne s'ennuie pas; c'est une vocation exigeante et un
tant soit peu nomade. On s'active d'Archives nationales et
Archives départementales, on fait un crochet par les
Archives d'Outre-Mer pour revenir à la Maison-Mère.
On est accueilli partout à bras ouverts - moyennant
cotisation - par des Centres généalogiques, qui poussent
comme des champignons dans les sous-bois de la Recherche.
La première semaine de noviciat - l'apprentissage -
n'est guère facile : pour pénétrer dans ces lieux austères
bourrelés de reliures anciennes où chacun officie pour son
compte en silence, il faut déjà une copieuse dose de foi.
Comment formuler décemment ma requête à cet employé
derrière son guichet ? Ma simple voix fait lever la tête à
toute une tablée de chercheurs où flotte une odeur de
parchemin sec et de papier moisi.
Je m'enlise irrémédiablement dans des explications
telles que : "le grand-père de mon trisaïeul qui ..." et
"... le grand-oncle de ma bisaïeule que"
- "Vous avez la cote ?" interrompt le guichetier.
Longue stupeur de ma part.
- "Qu'est-ce-que ça veut dire ?"
- "Quels documents voulez-vous consulter ?"
- "Euh ... si je le savais! ..."
Une pause s'ensuit où chacun se replie sur ses
positions. Une âme compatissante s'approche alors de moi,
toute disposée à me sortir d'affaire :
- "Avez-vous consulté les Tables décennales ?"
Autre longue stupeur ...
- "Qu'est-ce-que c'est ?"
Je souhaite à chaque chercheur débutant de rencontrer
comme moi, au bon moment, une âme compatissante. Vaincue
par mon ignorance, c'est elle qui a guidé mes premiers pas
dans la jungle tragique des documents d'archives, hérissée
de "cotes" et bien gardée par les "Tables décennales" et
autres portes dont il faut d'abord s'échiner à trouver la
clef.
Somme toute, je ne regrette rien, au contraire : au
bout de chaque effort surgit une découverte et au bout de
chaque fausse piste se profile un nouvel horizon.
L'assurance venant peu à peu, on lève de temps à
autre le nez des documents et, avant l'irrémédiable crampe
dans la nuque, on se décroche des écrans lumineux pour
lecture de films. Alors, on ne tarde pas à remarquer les
habitués dont on envie secrètement l'allure décontractée.
Ils ont une façon souveraine et pépère d'évoluer entre les
travées et d'atterrir sans encombre à la place élue avec
une pile de microfilms.
Ces habitués, mine de rien, avec une nonchalance de
virtuoses, ont su pianoter sur le clavier des terminaux
d'ordinateurs la cote exacte du Sésame des Antilles,
petite musique informatique en clé de SOM ou COL qui ouvre
les cavernes mormones des trésors d'archives.
Bientôt, les habitués, à leur tour, daignent vous
remarquer. Grands seigneurs, ils vous refilent des bribes
d'informations qu'on reçoit comme la manne au désert.
Encore quelques patients efforts, et on accède soi-
même à l'enviable échelon. Plus besoin de moniteur
patient : on peut se pianoter tout seul (attention,
séparateurs !) le glorieux passage aux Caraïbes de ses
ancêtres créoles.
Naissances, mariages, décès, notaires ...
Et même, ô luxe des luxes, on peut donner en passant un
coup de main à son voisin novice en panne de bobine. Il
faut voir avec quel sourire on est récompensé !
Quant à mon arbre généalogique, il se porte bien,
merci ! A y regarder de près, il a peut-être perdu un
tantinet de son doré sur tranche (quatre générations en
Martinique, c'est honorable, sans plus; d'autres ont fait
beaucoup mieux), mais il a gagné en certitude de bonne et
ancienne sève gasconne.
Nouvelles recrues, chercheurs novices, enthousiastes
quêteurs d'ancêtres, à votre tour de tenter l'aventure à
présent et ... bonne chance !
NOUS RECU
d'Emmanuel Boëlle :
Lettres CHAUVITEAU, 1798-1800 (lettres non publiées)
transcription par E. Boëlle
(Voir GHC pages 52 à 54 et 295)
Voici le deuxième recueil constitué des lettres échangées
entre Joseph CHAUVITEAU, sa femme Sophie BIOCHE et leur
fille Sophie, aux Etats-Unis, d'une part, et leurs fils
Salabert, Chalon (à La Havane) et Louis (à la Martinique),
d'autre part. On y parle beaucoup de négoce, ou plutôt de
pacotille envoyée par les parents aux fils pour tâcher de
gagner un peu d'argent et améliorer une vie difficile. Un
index et un arbre généalogique permettent de situer les
nombreuses personnes citées, aux Etats-Unis, à Cuba, en
Guadeloupe et à la Martinique.
de Jeannine Guilhon
Un arbre généalogique de la branche guadeloupéenne de la
famille BLAIN DESCORMIERS, originaire de Nantes (plus de
10 générations).
Révision 26/08/2003