G.H.C. Numéro 29 : Juillet-Août 1991 Page 363
NOUVELLES DES ARCHIVES D'AIX-EN-PROVENCE
Chantal Cosnay
Aux Archives nationales d'Aix-en-Provence, une
tendance à l'amélioration mérite d'être soulignée.
S'il est toujours d'actualité de remercier pour leur
amabilité et leur compétence les présidents de la salle de
lecture, il est nouveau de constater la bonne volonté des
magasiniers mutés à Aix. Ces nouveaux-venus sont aimables,
comprennent nos difficultés et la bonne volonté de tous
résout déjà la moitié des problèmes. Il faut le dire.
Par ailleurs, le nombre des documents consultables
était revenu à 8 documents d'archives par jour -à défaut
des 12 documents autorisés jusqu'au printemps 1989- et 10
ouvrages de bibliothèque. Depuis le mois de mai cependant,
nous avons subi une réduction de 8 à 6 documents par jour
en commandant deux documents par levée de fiches. Nous
espérons vivement que cette mesure n'est que passagère.
A signaler que les tables décennales d'Outre-Mer ont
été microfilmées : ces microfilms sont en usuel (des
origines à 1885).
Enfin, une bibliothèque d'usuels a été installée dans
la salle de lecture. On peut y trouver des guides d'ar-
chives sur les dépôts du monde entier, des inventaires,
des ouvrages d'histoire générale et de méthode ou des
guides de sources d'archives. Ce qui permet à tout lecteur
de préparer sa recherche dans de meilleures conditions.
Ces améliorations méritaient d'être signalées.
Il n'en reste pas moins le problème de la "surpopula-
tion" des lecteurs. Citons un passage de l'historien René
Rémond dans son "Introduction à l'Histoire de notre temps"
tome 1, page 37 : "De 1950 à 1976, la population mondiale
a augmenté d'un milliard et demi. Cet accroissement en un
quart de siècle est vertigineux : il dépasse à lui seul la
population mondiale de 1750 (...) Il convient d'abord de
prendre acte de l'importance du phénomène. C'est un des
faits humains les plus importants et les plus lourds de
conséquences. Les effets de cette révolution démographique
sont innombrables et ils sont à la racine de tous nos
problèmes contemporains."
Pour en revenir aux Archives, les statistiques montrent
que les chercheurs y sont de plus en plus nombreux. On
peut s'en réjouir ou s'en plaindre. Le fait est qu'il est
raisonnable de le considérer comme un phénomène en soi.
Concrètement, prenons l'exemple du jeudi 25 avril
1991 : environ 70 lecteurs sont venus dans une salle
prévue pour 48. Au guichet des renseignements, nous avons
attendu à la queue leu leu 40 minutes. Ensuite, 30 minutes
devant le guichet "remise des documents" pour remettre un
carton d'archives et prendre le carton suivant : nous
avons droit à 8 cartons d'archives par jour, mais un seul
à la fois. Heureusement, tout le monde avait le sourire ce
jour-là et nous avons entamé conversation.
Nous ne nous battons pas encore pour utiliser le seul
lecteur-reproducteur de microfilms qui fonctionne (nous
disposons de quatre lecteurs et un lecteur-reproducteur :
l'autre est en panne depuis 6 mois). Aujourd'hui, nous
n'avons plus l'occasion de nous disputer : le dit lecteur-
reproducteur restant est en panne. L'ennuyeux, c'est que
nous sommes en mai, c'est-à-dire en pleine période d'exa-
men, et que nombre d'étudiants en sont gênés.
Au total, constatons les améliorations, et une
compréhension de la part de tous des problèmes qui se
posent, compréhension qui est au départ des solutions.
JEAN-BAPTISTE TIRANT de LA FORGE ET SA DESCENDANCE
Bernadette et Philippe Rossignol
Les premières mentions de la présence en Guadeloupe
de Jean-Baptiste TIRANT sieur de LA FORGE sont données par
le RP Dutertre, qui le nomme toujours "LA FORGE, lieute-
nant". Voici ces mentions, assorties de commentaires :
L'affaire se passe à l'époque où Charles HOUEL est
parti pour France, ayant établi pour lieutenant général en
son absence "le sieur MARIVET, homme adroit et rusé, qui
avait fait la fonction de juge de l'île". "Mais, comme
s'il n'eut pas pris une entière confiance en lui, il lui
donna pour surveillant un certain Mathurin HEDOUIN, qui de
son boulanger était devenu (...) son maître d'Hôtel et
l'intendant de sa maison. (...) On a cru aussi que la
demoiselle de LA FAYOLLE avait reçu quelqu'ordre secret de
les observer tous deux." A la suite d'une querelle entre
ces trois personnages, "LA FAYOLLE résolut la perte du
sieur MARIVET". Elle fit assembler ses partisans "le cin-
quième décembre 1644" et "la résolution fut prise de
l'arrêter, ce qui fut exécuté dès le lendemain. Car le
sieur MARIVET, qui ne se doutait nullement de leur
dessein, étant sorti sur les six heures du matin de sa
maison demi habillé et s'en étant éloigné d'environ
cinquante pas, cent cinquante hommes, commandés par le
sieur de LA ROCHE, s'étant glissés entre lui et la porte,
un nommé la FORGE, lieutenant d'une compagnie, lui ayant
mis le pistolet à la gorge, lui dit "demeure là"; comme le
sieur MARIVET voulait lui demander le sujet pourquoi il
lui parlait de la sorte, Mathurin descendit de sa chambre
comme un furieux, l'épée nue à la main pour le tuer, et
l'eut indubitablement percé au travers du corps, si le
sieur MARIVET ne fut tombé à la renverse dans le fossé;
d'où ces révoltés l'ayant tiré, ils le conduisirent au
corps de garde, où Mathurin lui-même lui mit les fers aux
pieds, et le fit attacher par le milieu du corps avec une
chaîne de cent treize mailles, aussi grosse que celle des
galériens".
Il resta en prison jusqu'au retour, le 29 mai 1645,
de Charles HOUEL, qui le fit libérer, mais ne prit aucune
sanction contre ceux qui l'avaient emprisonné, malgré les
ordres qu'il avait reçus de la Compagnie, avant son retour
en Guadeloupe, ce qui fait supposer à Du Tertre que tout
avait été effectué sur ses ordres secrets.
L'épisode suivant est de fin novembre 1646, quand
Charles HOUEL chasse de Guadeloupe PATROCLE de THOISY. Le
R.P. Du Tertre, curé de la Capesterre, ayant su la conspi-
ration, va de case en case dans ce quartier dissuader les
habitants de s'y prêter :
"Après leur avoir demandé qui leur commandait et ayant
appris que c'étaient le sieur du Mé, capitaine, du PONT,
major, la FORGE, lieutenant, mais qu'on ne disait pas de
la part de qui, je leur ai remontré avec assez de force
que cette entreprise était d'une étrange conséquence, et
que, quand même elle aurait un succès tel que ceux qui en
étaient les chefs le pouvaient désirer, la vie et les
biens des pauvres habitants en répondraient un jour; que
Dieu ne laisserait pas ce crime impuni et qu'il les
châtirait comme les violateurs du serment de fidélité
qu'ils avaient tant de fois réitéré à M. le Général, et
qu'après tout c'était l'homme du Roi, chargé de sa commis-
sion et représentant sa personne et que tous ceux qui
prendraient part à cet attentat se rendraient criminels de
Révision 26/08/2003