G.H.C. Numéro 28 : Juin 1991 Page 339

DEPUTES A LA CONSTITUANTE : Charles Léon de TAILLEVIS de PéRIGNY

travail effectué.  On s'aperçoit par ailleurs que l'évolu-
tion  sociale,   financière,   politique,   militaire  des
familles étudiées, rejoint l'Histoire de notre pays.
     Pour nous, "Iliens", le chapitre VII, intitulé "de la
Cour de Nérac aux Isles d'Amérique",  nous tient  particu-
lièrement à coeur, puisqu'il concerne la famille TAILLEVIS
de  PéRIGNY,  qui  fit  souche à  St-Domingue,  après  que
Charles Léon,  qui servit sur les vaisseaux et à  Léogane,
eut épousé au Mans, en 1739, une créole de St-Domingue née
à Torbeck,  Anne Marie Madeleine de LA TUSTE.  Nous avons,
là encore, l'exemple maintes fois signalé d'une créole qui
épouse  un métropolitain bien titré et lui apporte en  dot
"trois caffeteries,  deux cotonneries, deux sucreries, une
indigoterie,  plus  une habitation à Torbeck qui deviendra
la  maison  PéRIGNY,  le tout estimé à trois  millions  de
livres".  Charles Léon entrera dans l'Histoire en  signant
le  Procès Verbal du Serment du Jeu de Paume,  puis  comme
député de la Constituante.  Un autre TAILLEVIS, mais de la
branche  de JUPEAUX,  deviendra,  sauf erreur de ma  part,
sinon le premier, du moins l'un des premiers directeurs de
la Banque de la Guadeloupe.

Si vous désirez vous procurer cette remarquable plaquette,
vous pouvez vous adresser à Michel de Gouberville,  Manoir
de Mansigny, 27150 Etrepagny. Prix de vente : 120 F.

                           ***

  Jean-Baptiste Anne Charlemagne de TAILLEVIS de PéRIGNY
     fils du député de St-Domingue à la Constituante
                     Pierre Baudrier

     Capitaine  de vaisseau,  né à Léogane le 20 mars 1762
et  décédé  à  Passy le  11  avril  1832,  Charlemagne  de
TAILLEVIS de PéRIGNY était fils de Charles Léon, député de
St-Domingue  à  l'Assemblée  nationale,  et  d'Anne  Marie
Magdeleine  de LA TUSTE.  Marié à Stasbourg le 19  juillet
1791 avec Marguerite Barbe DUPONT, il en eut sept enfants,
dont Barbe Charlotte Hilaire Magdeleine,  née à Strasbourg
le 18 juillet 1792.
     Il  devait  être apparenté à Joséphine TASCHER de  LA
PAGERIE.  Plus précisément,  c'est son frère Louis Charles
Théodat qui affirme "appartenir à Mme BONAPARTE" dans  une
lettre au Premier Consul de son dossier aux Archives de la
Marine.

     En début de carrière,  Charlemagne avait fait échouer
le  brick  "Le Tartare" dans les Antilles - sur erreur  du
pilote  monté à bord,  selon lui - et,  si les sources  ne
portent pas de trace de démenti,  toujours est-il qu'on ne
le  retrouve  qu'incarcéré quatre mois à la  tour  de  ...
Berne,  jusqu'au  début 1791,  pour propagande révolution-
naire.
     C'est  ensuite  qu'il  se rend à  Strasbourg,  où  il
devient commis surnuméraire au département et s'inscrit  à
la Société des Amis de la Constitution.  Il prend le parti
de Jean-Charles LAVEAUX et, début avril 1792, est chargé -
ainsi  qu'ALEXANDRE et SIMOND - de porter une condamnation
de DIETRICH aux Jacobins de Paris.  Il y présente la péti-
tion  le 6 mai et annonce le 21 la libération  de  LAVEAUX
qui s'était opposé à DIETRICH sur la guerre et les prêtres
réfractaires et avait été arrêté quelques semaines.
     Le 28 décembre 1793, il est témoin à charge au procès
parisien  de DIETRICH,  alors qu'il était lui-même  empri-
sonné à l'Abbaye depuis le 9 septembre 1793.  Il avait été
destitué  de son poste d'adjoint à la première division du
ministère  de  la Marine,  suspecté  d'avoir  favorisé  la
trahison de Toulon.  Il s'en défendit. Libéré le 2 janvier
1795,  il  est,  le 16 février 1796,  sous-chef du  bureau
central  des équipages d'artillerie de Marx BERR,  Lipmann
CERFBEER,  Théodore CERFBEER et de leur frère Samuel,  qui
le  constituent leur procureur général et spécial pour  le
personnel de l'entreprise, ouvriers et charretiers.
     Par  arrêté du 25 frimaire an VI,  il est réformé  et
pensionné à 2.000 francs par an.  En 1797 et 1798, à l'oc-
casion de l'expédition d'Egypte,  il est adjoint au secré-
taire  général du ministère de la Guerre.  Aussi  était-ce
son père, ex-député de la noblesse aux Etats-Généraux, qui
avait été condamné à mort par contumace après le 13 vendé-
miaire an IV.
     Charlemagne  est  sous-préfet de Malmédy  de  1804  à
1814.  Il  se  conduit avec bravoure à l'incendie de  Spa.
L'impératrice Joséphine lui aurait procuré une pension  de
6.000 francs,  en un versement unique.  En tout cas, c'est
cette somme que, par acte du 15 juillet 1811, il obtint de
deux demoiselles REYNES de PRODéJAC, contre paiement d'une
rente viagère.
     Un   rapport   de  l'époque  l'estime   textuellement
"dépourvu  parfois  de mesure et  de  jugement,  ayant  de
l'esprit, pas administratif, gai, délicat, étourdi, ferme,
bon  mari  et  bon père." Chevalier de  Saint-Louis  le  5
juillet  1814,  il est sous-préfet de Bar-sur-Aube pendant
une  partie des Cent Jours mais se concilie "l'estime  des
amis de l'ordre et du Roy".

     Après  plusieurs sollicitations,  des recommandations
mais aussi des rapports réservés ou négatifs des  bureaux,
voire  des  refus motivés,  il ne fut pas replacé sous  la
Seconde  Restauration.  Ainsi,  en 1820,  il postule  sans
succès au poste de capitaine du port de Basse-Terre. Le 25
mai 1816,  il est "admis aux secours" aux propriétaires de
St-Domingue. Sa pension de sous-préfet est fixée à 1.200 F
le  11 juin 1816.  Il est,  à vrai dire,  à lui  seul  une
histoire des pensions de l'époque.  Le 9 juillet 1817,  sa
pension  au titre des services sur mer et dans les  minis-
tères,  de  1.200 F également,  est réduite à 727 F et,  à
partir de 1825,  il perçoit un secours annuel de 900 F sur
le fonds des colonies.  Enfin,  le 28 janvier 1828,  c'est
son  épouse,  "belle-fille d'un député aux états  généraux
qui  s'est  distingué par ses  bons  sentimens",  dont  le
secours  annuel  de 720 F est converti en une  pension  de
500 F.  La  Monarchie  de  Juillet appliqua  une  nouvelle
législation  sur  les  pensions  et,   le  19  août  1830,
Charlemagne  sollicitait  un emploi  de  l'administration,
recommandé par Charles de LAMETH, ex-préfet de la Roër, et
Alexandre de LABORDE.

Sources :
- Archives de la Marine
- Archives nationales  :  F/7/4775,  d.  2;  F/1bI/174/1;
O/3*/536, n° 5126; W/305, n° 366; W/557-558.
- Minutier central : XXI/629; XVIII/1050
- Dr E.  Muhlenbeck "Il y a cent ans! ...(Euloge Schneider
et  Saint-Just)",  in Revue d'Alsace,  oct-nov-déc.  1893,
nlle série, t. 7, pp. 464-5.
- L.  Spach "Oeuvres choisies" tome  premier,  Biographies
alsaciennes, Première série, 1866, p. 316.
- H. Gough "Politics and power : the triumph of jacobinism
in Strasbourg, 1791-1793" in Historical Journal, 23, 1980,
p. 334, 337, 343, 345, 346 et n. 63.



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Révision 26/08/2003