G.H.C. Bulletin 26 : Avril 1991 Page 305

THESE

        Les  habitations LABORDE à SAINT DOMINGUE
        dans  la seconde moitié du XVIII° siècle.
  Contribution à l'histoire d' HAITI (Plaine des Cayes)
          par Bernard Foubert (GHC 24 page 273)

     Tous nos remerciements à P.H.  Gaschignard pour avoir
demandé  à Bernard Foubert de nous adresser ses  positions
de thèse,  dont nous faisons ci-après un résumé,  et, bien
sûr, merci à Bernard Foubert lui-même.

     Les sources manuscrites de cette thèse,  archives  et
papiers  privés,  se trouvent à Londres,  en France et  en
Espagne.

              Première partie : la création
       et la mise en valeur du domaine (1768-1791).

     Les  habitations sucrières Laborde,  situées dans  la
plaine des Cayes,  au sud de l'île,  couvraient,  en 1789,
1.500 hectares et employaient 1.400 esclaves.
     Leur  propriétaire  était Jean Joseph LABORDE,  né  à
Jaca en Espagne en 1724, qui fonda sa maison de commerce à
Bayonne en 1751 puis,  banquier de la cour de 1759 à 1767,
édifia  une  immense fortune et fut  guillotiné  en  1794.
C'est sur les conseils du chevalier Jean Baptiste PICOT et
de son régisseur Jean Baptiste GéRARD (voir GHC 7 page 45)
qu'il acheta ses habitations à diverses personnes :  l'ha-
bitation Conflans,  en 1768,  au comte de CONFLANS, ancien
gouverneur,   l'habitation   de   l'Islet,   l'indigoterie
Dibasson  et l'habitation Grimaud,  en 1771,  à des  négo-
ciants nantais.
     La  canne  à sucre avait été  introduite  tardivement
dans  ce quartier,  grâce au réseau  d'irrigation  réalisé
entre 1759 et 1765 par DAVEZAC de CASTERA.
     La  surface  cultivée en cannes augmenta peu  à  peu,
repoussant  les cultures vivrières et obligeant au  défri-
chement  de bois étendus.  L'amélioration du rendement des
terres  demanda  beaucoup d'effort aux régisseurs  et  une
augmentation considérable de l'effectif des ateliers d'es-
claves. Pour passer de la production de sucre brut à celle
de  sucre blanc,  il fallut construire de  nouveaux  bâti-
ments,  ce  qui entraîna de fortes dépenses et un  détour-
nement  d'une  partie  de la main d'oeuvre destinée  à  la
culture.  Les  bâtiments destinés à la fabrique  du  sucre
furent parmi les plus importants édifiés dans la plaine du
Fond  et  coûtèrent  en vingt ans plus de  750.000  livres
coloniales,  alors  que  les cases des régisseurs  et  des
esclaves furent toujours rudimentaires.
     Le  personnel  blanc formait des petites  équipes  de
quatre à cinq personnes,  surtout d'origine béarnaise,  et
les  gérants,  honnêtes,  venaient  principalement  de  la
famille  LAVIGNOLLE,  parente des LABORDE.  Mais  rien  ne
pouvait suppléer à l'absence du propriétaire.
     L'atelier  passa,  de  1768 à 1781,  de 225  à  1.441
esclaves. Il y eut 2.273 achats d'esclaves, dont les trois
quarts venaient de la traite, en majorité des congo, ainsi
que des nago et des arada. Il y avait, en 1791, 60% d'hom-
mes et l'immense majorité travaillait à la canne.
     L'opération  centrale  était la production  de  sucre
blanc.  Les trois habitations Laborde en produisaient près
de 1.400 milliers (de livres poids) et représentaient,  en
1791,  presque  8%  de la valeur des cent sucreries de  la
plaine des Cayes.  Le caractère aléatoire des revenus pour
le  propriétaire s'explique par les nombreux  obstacles  à
l'expédition et un rendement de 6 à 7%.
     Un  chapitre de la thèse étudie les régies  de  trois
gérants successifs d'une des habitations :  Louis François
gérants successifs d'une des habitations :  Louis François
DANTAN, Marie Etienne FRAISSE et Bernard LAVIGNOLLE.

                    Deuxième partie :
 la destruction et l'abandon des habitations (1792-1803)

     Cette  partie suit les répercussions de la révolution
de St Domingue sur les habitations Laborde,  au temps  des
premiers  soulèvements,  puis de POLVéREL,  de RIGAUD,  du
général  LAPLUME  et  de l'expédition  LECLERC.  En  1810,
RIGAUD  et sa famille s'installèrent sur  les  habitations
LABORDE  et l'indemnité de 1832,  fixée à 589.735  francs,
fut   attribuée  aux  enfants  survivants,   Alexandre  et
Nathalie  de  LABORDE,  leur  frère  François  LABORDE  de
MéRéVILLE étant mort à Londres le 3 octobre 1802.
     L'aspect essentiel pour l'histoire d'Haïti,  c'est la
tenacité  irrésistible avec laquelle les anciens  esclaves
devenus  "cultivateurs"  firent prévaloir  leur  droit  de
s'établir  où  bon leur semblait et de  posséder  quelques
carreaux de terre. Il s'agit là d'un des traits majeurs de
cette révolution sociale qui fit disparaître l'économie de
plantation  pour lui substituer une agriculture de subsis-
tance associée au café.




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