G.H.C. Bulletin 2 : Fevrier 1989 Page 8

LA FAMILLE VENDRYES DANS LES ANTILLES
Arnaud Vendryes

          J'avoue que je suis pris, en commençant d'écrire 
cet article, par un subtil  doute...  existentiel.  Est-ce
bien, en effet, l'endroit idéal pour parler d'une  famille
qui N'A JAMAIS REUSSI  A  S'IMPLANTER  DANS  LES  ANTILLES
FRANCAISES? 
   
                                                               
          Pensez donc: pour au moins six personnes  qui  y
ont pris pied, entre 1719 environ et 1830,  il  reste  sur
place une descendance de zéro. C'est peu.
                                                               
          Il y a aujourd'hui  des  VENDRYES  à  Paris,  en
Jamaïque et jusqu'en Colombie, il y en a eu jusqu'au début 
de ce siècle dans  l'Océan  Indien  (Maurice,  Réunion  et
jusqu'aux  Seychelles),  mais  à  ma  connaissance   leurs
séjours en Guadeloupe ou  à  Saint-Domingue  n'ont  jamais
réussi à être que fort courts.
                                                               
          Mais commençons par le commencement.
                                                               
              1. Préambule sur les origines
                                                               
          La première mention de la famille figure,  à  ce
qu'il  semble,  dans  un  registre  notarial  de  Peyrusse
(Aveyron). Il s'agit, à la date  du  5  février  1445,  du
contrat de mariage d'un Jean de Vendrias, de Toirac  (Lot)
avec une Jeanne Cavallac (1).

          C'est à Figeac, plus précisément  dans  le  fau-
bourg du Pin, que nous retrouvons cette famille,  au  tout
début du XVIIème siècle. A l'heure où  peut  commencer  un
suivi généalogique rigoureux, ils y exercent  de  père  en
fils - de Jean en Jean, ce  qui  ne  facilite  rien  -  la
profession de tuilier.

         Vers le milieu du siècle, ils abandonnent  Figeac
et l'artisanat pour rejoindre Bordeaux, où nous retrouvons 
un Jean-François VENDRYES (né à Figeac en 1668) conseiller 
du roi et greffier en chef des affirmations  au  parlement
de Bordeaux. Aucune trace de son acte de décès,  mais  les
notices biographiques des membres du Parlement réunies par 
le Conseiller Jean de  Raoul  nous  disent  que  "Vandrier
Joannes affirmationum actuarius, difformis, sororem Poncet 
uxorem duxit. Obiit anno 1722. Obiit die martis  28  julii
1722" (2). Dont acte.

          De son mariage avec  Marie  PONCET  (Bordeaux  9
février 1698) naquirent onze enfants, dont Louis  t  Jean-
Baptiste sur le cas desquels  nous  allons  nous  pencher,
sans oublier une Marie-Gabrielle qui épousera  l'Irlandais
William COPPINGER, une Marie-Angélique  qui  finira  reli-
gieuse de la Visitation au couvent de Verdun  t  un  Jean-
Pierre, dont nous retrouverons la descendance  plus  loin.
Plus six autres que ce récit oublie volontairement.

                  2. Première tentative

          Louis VENDRYES, né à  Bordeaux  le  27  novembre
1698, épouse à  Terre-de-Bas  (ile  des  Saintes),  le  14
novembre 1719, Marie-Anne MARION.
          D'où trois enfants, baptisés à  Sainte-Hyacinthe
de la Capesterre et à Mont-Carmel entre 1721 et 1724.

          Puis... plus rien. Mais je peux imaginer par des 
actes ultérieurs que notre homme est parti à la Dominique, 
qu'il y a épousé en secondes noces une Marie RIVIERE, d'où 
d'autres enfants sans doute dont une  Marie,  née  sur  la
paroisse Saint Joseph de la  Dominique,  qui  reviendra  à
Marie-Galante épouser Jean-Baptiste GIRARD en 1759.  Quant
à Louis VENDRYES, plus de trace.

          Allons-nous en rester là? pas du tout. Voici que 
le frère de Louis, Jean-Baptiste, arrive à son  tour  dans
les Isles. Le 31 mai 1740, il épouse à Sainte-Anne  de  la
Capesterre (Marie-Galante) Marguerite LENOBLE.  Le  testa-
ment de sa mère le décrit comme vivant aux îles Vieux-Fort 
de Marie-Galante, entouré de ses enfan s  -  dans  l'état-
civil, je ne trouve trace que d'une  Marguerite  Félicité,
morte en 1767. Jean-Baptiste meurt lui-même en 1766. 
          Plus de trace pendant 26 ans. Puis:

          "l'an 1792, le 25 septembre,  a  été  inhumé  le
corps de Rosette, mulâtresse, épouse  de  Vandrier,  aussi
mulâtre, libre..." (Vieux-Fort).
                    Fin de l'épisode.

                  3. Deuxième tentative

         Pendant que ses rejetons perdus vivaient leur vie 
dans les Antilles, la famille, en France, avait  prospéré.
Le fils de Jean-François, Jean-Pierre, était devenu  rece-
veur des domaines du roi à Villefranche-de-Rouergue. Il  y
avait épousé en 1735 une Marguerite PRADINES.

         L'un de ses douze enfants, Jean-Baptiste,  né  en
1736 près de Villefranche, devint docteur en droit,  agré-
gé, et avocat au Parlement de Bordeaux. 
         De son premier mariage  avec  Mlle  FOUCAULD,  de
Libourne, il eut un fils, Louis.

         A 18 ans, celui-ci forma une pacotille pour  par-
tir aux Etats-Unis (nous sommes aux environs de 1776).  Il
n'avait pas encore quitté la Gironde qu'il était pris  par
les Anglais, avant même la déclaration de guerre...(3)
         Dix ans plus tard, devenu écrivain des  colonies,
il s'embarque pour Saint-Domingue.  l  épouse  à  Port-au-
Prince, en 1788, Marie-Antoinette ADAM,  ce  qui  le  fera
entrer dans la famille du futur maréchal CLAUZEL.

         La destinée le frappe à son tour: il  est  obligé
de quitter l'ile en 1792, rejoint Philadelphie, revient  à
Saint-Domingue en 1795, et s'installe définitivement à  la
Jamaïque où il meurt le 11 janvier 1820.

          Parmi ses enfants, Henry, né à Kingston en 1798, 
fut élevé en France au collège de Vendôme où il eut  comme
condisciple Honoré de BALZAC (ils furent ex aequo pour  le
seul accessit de l'écrivain en 1812...) (4). De  retour  à
la Jamaïque il épousa le 1er avril 1819  mlle  TEYCHOIRES.
En 1842 il entra en relation avec le prince Louis-Napoléon 
pour l'engager à eccepter le gouvernement d'une république 
en Amérique Centrale (5); il aurait  acheté  des  armes  à
New-York pour soutenir ce projet (6). Plus tard, en  1853,
nous retrouverons le même, venu présenter à l'Empereur  le
projet d'un canal en Colombie, la Dique de Carthagène (7). 

          Leurs descendants sont  maintenant  nombreux  en
Jamaïque. Mais pour ce qui est de nos Antilles...          



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