G.H.C. Bulletin 89 : Janvier 1997 Page 1832

Compléments et commentaires sur la famille van SUSTEREN
en Guyane et aux Antilles au XVIIème siècle

Jean-Christophe Germain

Ces  "compléments et commentaires" font suite à  l'article
intitulé  :  "De VAN SUSTEREN et quelques autres huguenots
guadeloupéens",   publié   par   Bertrand   van  Ruymbeke,
Bernadette  et  Philippe  Rossignol,  dans  Généalogie  et 
Histoire de la Caraïbe (N°85, Septembre 1996), pages  1714
à 1716. 

I. Compléments.

1. West-Souburg en Zeeland.
Johannes (Jean) van SUSTEREN s'est  marié  le  11  juillet
1679 à West-Souburg (1)), dans la province de Zélande  aux
Pays-Bas,  à  Prina   RUBBENS   qui   avait   fourni   une
"attestation (de  publication  de  bans  de  l'église)  de
Vlissingen" (2).

Hendrick (Henri) van SUSTEREN s'est  marié  dans  la  même
localité (West-Souburg), le 17  février  1682,  à  Barbara
RUBBENS qui a fourni pareille attestation (2).

2. Borome en Terre-Ferme de l'Amérique.
Le lieu de naissance de Mathieu  van  SUSTEREN,  "Borome",
nous est effectivement connu grâce à son acte de  mariage,
mentionné le 23 novembre 1688 dans le registre  paroissial
de Capesterre en Guadeloupe. Par ailleurs, le  recensement
des protestants de l'île en 1687 nous apprend que ce  lieu
est situé en "Terre Ferme de l'Amérique".
     En fait, dans l'esprit des Français  du  temps  cette
expression ne correspondait ni  au Brésil  (3),  ni  à  la
"Tierra Firme" espagnole (4), mais simplement à la Guyane, 
au sens large, c'est-à-dire au territoire délimité par les 
fleuves Amazone au sud-est et Orénoque au nord-ouest (5).
     En toute logique, c'e t  alors  vers  l'une  des  ex-
colonies néerlandaises de cette région qu'il faut  tourner
les  yeux  pour  retrouver   ce   "Borome".   Je   propose
l'établissement Zélandais du  Pomeeron  (6)  dont  le  nom
dérive  de  "Boumerome"  et  ses  multiples  variantes   :
"Boumeron-Poumeron-Bauron-Bauroma"  (7),  "Boromeo"   (8),
"Borowma" et "Bawrooma"(9), "Pauroma" (10), "Pawroma" (11) 
et "Beauroum" (12).

     L'argument de certitude émane,  à  mon  sens,  de  la
"Relation de ce qui s'est passé dans l s  Isles  &  Terre-
Ferme de  l'Amérique,  pendant  la  dernière  guerre  avec
l'Angleterre, & depuis en execution du Traitté de  Breda",
publiée à Paris en 1671 par un mystérieux  I.C.S.D.V.

     A la page 376 du tome I de ce rarissime  ouvrage,  on
peut lire en effet "La Coste de Terre ferme depuis le  Cap
d'Orange jusques vers  la  Rivière  d'Orenoc  estoit  lors
occuppée par trois Nations : Les Flamands  occuppoient  la
Riviere d'Aproaque; les François l'Isle  de  Cayenne,  les
Rivieres d'Uvia de Corrou, & de Sinamary (...). La Riviere 
de Maronny estoit  occuppée  d'un  petit  corps  de  garde
Anglois, leur principal establissement estant  dans  celle
de Suriname (...). Les Zelandois occuppoient la Riviere de 
Berbice, & avoient repoussé avec  perte  considérable  les
Anglois,  qui  les  y  avoient   esté  attaquer,   &   qui
s'estoient emparez sur eux  de  celle  d'Essequebe,  &  de
Borome".   

3. Borome ou Pomeroon.
A quelle date la colonie zélandaise de Borome ou  Pomeroon 
a-t-elle été fondée ? Selon le major  anglais  John  SCOTT
qui fut contemporain des faits (13), "The twelfth Collonie 
was of Dutch  setled  by  the  Zealanders  in  the  Rivers
Borowma, Wacopon, & Moroca, haveing  been  draue  of  from
Tobago Anno 1650 (sic)". Mais cette date de  1650  a  fait
l'objet de controverses (14), et elle doit être commentée.
     Certes, il semble bien qu'un comptoir de traite  avec
les indiens ait effectivement  existé  antérieurement,  au
confluent des rivières Pomeroon et Moruca.  Néanmoins,  le
premier établissement de planteurs à Borome  qu'on  puisse
distinguer   clairement   des    établissements    voisins
d'Essequibo et de Berbice, remonte en fait à l'année 1658.
     Le 24 décembre 1657, la  Chambre  de  Zélande  de  la
West-Indische Compagnie (15) avait en effet décidé l'envoi 
d'un navire pour porter  des  colons  à  Borome  rebaptisé
"Nova Zelandia". Le chef de cette  expédition  avait  pour
nom Cornelis Bastiansz. GOLIATH (16). 
     Ce  dernier  avait  pour  mission   de   dresser   la
cartographie de la Guyane, il devait  construire  un  fort
pour   loger  25  soldats  et  avait   enfin   la   charge
d'intendant de la compagnie à Borome.
     Le navire zélandais mouilla dans la rivière  Pomeroon
au milieu de  l'année  1658.  Un  bourg  fut  construit  à
quelques kilomètres en  amont  de  l'embouchure  et  nommé
"Nieuw Middelburg", ainsi qu'un fort nommé lui aussi "Nova 
Zelandia". Les planteurs se mirent  au  travail,  secondés
par des juifs luso-amsterdamois réfugiés du Brésil, et des 
esclaves récemment débarqués d'un  autre  navire  que   la
compagnie n'avait pas omis d'expédier à la côte d'Afrique.

     En 1661, GOLIATH mourut et il  fut  remplacé  par  un
certain François de FIJN. La nouvelle colonie se  maintint
cependant  et  devint   même   pendant   quelques   années
l'établissement néerlandais le plus florissant de la  côte
de Guyane.
     Mais la seconde guerre anglo-hollandaise n'allait pas 
tarder à éclater. Aussi, au  mois  de  décembre  1665,  le
Major anglais John SCOTT à la tête de  300  fantassins  et
guerriers caraïbes s'emparait des forts du Pomeroon et  de
l'Essequibo.
     Les Anglais pillèrent et brûlèrent  alors  les  habi-
tations des Zélandais, ne laissant  intacts  que  le  fort
"Nova Zelandia" et les engins à sucre qui  pouvaient  leur
servir. Une garnison de 28 hommes fut laissée  sur  place,
commandée par un Capitaine KEENE (17) puis le bataillon du 
Major SCOTT quitta les lieux, sans être parvenu  néanmoins
à anéantir l'établissement voisin de Berbice.
     Le butin avait été considérable, car  deux  ans  plus
tard SCOTT estimait à 160.000 livres le montant des prises 
qu'il avait faites à Borome,  Essequibo  et  Tobago  (18).
Mais sur le terrain, ce ne fut  pour  les  Anglais  qu'une
victoire à  la  Pyrrhus,  car  l'année  suivante  Matthijs
BERGENAAR, le commandant néerlandais de Berbice, parvint à 
reprendre sans difficulté le fort d'Essequibo. 

     A Borome, la garnison anglaise,  mal  ravitaillée  et
trop peu nombreuse pour se défendre efficacement, n'allait 


Carte (75KO)
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Révision 20/01/2004