G.H.C. Bulletin 82 : Mai 1996 Page 1635

La Caraïbe où on ne la cherche pas
Pierre Baudrier

    Consultant le tome V des "Représentants du  peuple  en
mission" (Paris,  1890)  d'Henri  Wallon,  en  songeant  à
Antoine-Claude-Xavier Garnier,  député  de  la  Meuse,  je
trouve cependant deux affaires de  déportation  en  Guyane 
aux pages 76-77 : 
    "... quand il y avait quelque atténuation possible, le 
tribunal (criminel de Douai) tempérait la peine. Un  lieu-
tenant  de  la  34e  division  de  gendarmerie,  convaincu
d'avoir dit : "Je suis citoyen et non pas républicain;  la
république m'a fait perdre non seulement ma fortune,  mais
encore elle a failli me faire perdre la vie", ne la perdit 
pas pour cela : il fut condamné à la déportation à  perpé-
tuité à la Guyane (même jour 13 germinal an  II]).  Il  en
fut de même de Joseph-Ambroise LALYSSE, lieutenant-colonel 
d'infanterie  du  27e  bataillon  de  réserve,   convaincu
"d'avoir proposé à un prêtre de dire  une  messe  pour  le
défunt Louis Capet", et "d'avoir dit que Capet était  mort
innocent". Le tribunal, pour écarter  la  peine  de  mort,
décida que ces propos ne caractérisaient  pas  une  provo-
cation au rétablissement de la royauté :
   Mais, ajoutait-il, comme il en  résulte  néanmoins  que
ledit  Lalysse  doit  être  considéré   comme   incivique,
partisan de la royauté et par suite  comme  un  ennemi  du
régime républicain; que de  la  facilité  qui  lui  serait
laissée de manifester ses opinions résulterait  que  ledit
Lalysse pourroit soulever les  esprits  contre  le  régime
unanimement adopté par la nation; que de  là  est  résulté
déjà et pourrait  résulter  encore  que  le  séjour  dudit
Lalysse  dans  l'intérieur  de  la  République,  y  a   et
pourrait, par événement, y occasionner des troubles et des 
agitations qu'il importe de réprimer et de prévenir.
  Par ces considérations et sur les conclusions de l'accu- 
sateur public entendu de nouveau et vu les dispositions de 
la loi du 7 juin 1793, condamne Lalysse à la déportation à 
vie à la Guyane française avec confiscation des biens (1er 
pluviôse an II)." 

   Consultant le  "Dictionnaire de  Biographie Française"
pour revenir à Garnier de la Meuse,  je tope sur d'autres
GARNIER. C'est d'abord Emile-Victor-Adolphe, né à Cayenne 
le 25 juin 1847 mais qui part bientôt pour la  métropole.
On a aussi  Jacques  Garnier,  dit  Garnier  de  Saintes,
député. "Le 30 novembre (1792),  à  l'assemblée,  il  fit
décréter d'arrestation BLANCHELANDE, gouverneur de Saint- 
Domingue,  pour s'être opposé à la libération des  noirs;
il fit de même pour le général  MARCÉ."  Pierre-Dominique
Garnier, général  de  division,  né  à  Marseille  le  19
décembre 1756, fut volontaire  dans  les  Dragons  de  la
Guadeloupe de 1780 à 1787. Mais à voir passer des Garnier
de toutes les régions de France, on s'endort presque.  Et
c'est ainsi qu'apparaît Jean-Philippe  GARRAN  de  COULON
qui, à l'Assemblée Nationale, encore, "opine par  2  fois
dans les discussions sur les affaires de St-Domingue, le 7
décembre 1791 et 29 juin 1792, et fournit un rapport où il
réclame les  mêmes  droits  pour  les esclaves noirs,  les
mulâtres et les colons... Par ailleurs, il fut nommé grand
procurateur (accusateur public) près la  haute cour natio-
nale siégeant à Orléans en août 1792, ne sut pas effectuer 
à  temps  le  transfert  des  prisonniers  à  Semur  comme
l'ordonnait l'assemblée, les laissa enlever  par  FOURNIER
L'AMÉRICAIN  et  conduire  à  Versailles  où  ils   furent
massacrés le 2 septembre."
     En fait, la date exacte est le 9 septembre  et  il  y
eut quelques rescapés. 
    Or le tome V d'Henri Wallon  contient  un  détail  sur
GARRAN de COULON et surtout signale à quelques  lignes  de
là un canonnier noir qui  participa  aux  journées  de
prairial an III. Le député FÉRAUD ayant été  tué  par  les
insurgés, l'assemblée nationale fit attaquer  le  faubourg
Saint-Antoine avec d'autant plus d'énergie et c'est  ainsi
que le 4 prairial  (p.  226)  "Parmi  les  prisonniers  se
trouvaient 26 gendarmes, dont 9 à cheval, et le "canonnier 
noir" qui, l'avant-veille, avait braqué  le  canon  contre
l'assemblée." et pp. 226-227 "Le 5, dès le commencement de 
la séance, on reçut et on lut une lettre de la  Commission
militaire portant: Citoyen président, nous nous empressons 
de vous transmettre le jugement que nous avons rendu  hier
contre le nommé DELORME, capitaine  de  canonniers  de  la
section de Popincourt (c'était le nègre dont  avait  parlé
Fréron)... (1)
   (1) Lettre de la Commission militaire établie en  vertu
de la loi du 1er prairial. (C'est le 4 qu'il  faut  lire.)
Séance du 5 prairial, "Moniteur" du 9 (22  mai  1795),  t.
XXIV, p. 540."
     Wallon ne donne pas la référence précise de la dénon- 
ciation de Delorme par Fréron mais on devrait retrouver le 
passage dans les nombreuses références qu'il cite.

     Quant à "Garran-Coulon", notre point  de  départ,  il
avait obtenu que l'on renonce à punir de mort les citoyens 
donnant asile aux fugitifs de l'insurrection.

   A la page 243 de Wallon, Delorme, condamné à mort le  4
prairial, est présenté comme mulâtre. On renvoie à la cote 
W, 548  des  Archives  Nationales.  D'ailleurs,  Guillaume
Delorme a une notice de 18 lignes dans le  "Répertoire  du
personnel  sectionnaire  parisien  en  l'An  II"  d'Albert
Soboul et Raymonde  Monnier  (Paris,  Publications  de  la
Sorbonne, 1985). Il était né à Port-au-Prince.

   Louis-Stanislas Fréron, précité,  fils  de  l'homme  de
lettres, mourut en  1802  à  Saint-Domingue  où  il  avait
accompagné LECLERC.

Généalogiste professionnel

   GénéOm, Etude de recherches généalogiques Outre-mer
  9 rue Nassau, 97110 Pointe-à-Pitre, (19-590) 93 09 48

Cabinet spécialisé dans la régularisation des problèmes du 
foncier; s'occupe aussi de  recherche  d'héritiers  et  de
recherche d'ancêtres.
  E. Vélin, maître en droit, généalogiste professionnel

RÉPONSES

94-31 PITAULT (Martinique ou Guadeloupe, 18°)
(voir pages 1555, 1566, 1473, 1485, 1630)
Voici ce que j'ai relevé sur les PITAULT  du  MARTRAY  aux
archives  du  Morbihan  (11B57)  :  en-tête  d'une  lettre
adressée à son cousin ADVISSE DES RUISSEAUX, à Vannes  par
"Pitault  du  Martray,  négociant  à  Saint-Pierre  de  la 


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Révision 28/12/2004