G.H.C. Bulletin 79 : Février 1996 Page 1537
Mesures antillaises Guy Stehlé
La diversité des systèmes de mesure "locaux" a
toujours été telle en Europe que déjà, en 789, Charlemagne
aurait voulu imposer dans son Empire une homogénéité des
mesures de longueur, de superficie, de volume et de poids.
Cette réforme n'a pas survécu à son créateur, et à nouveau
régna très vite en ce domaine la plus grande confusion.
C'est en définitive la Première République française
qui, le 7 avril 1795, créa le système métrique décimal.
A ceux qui habitent la région parisienne, je recommande
d'aller contempler le premier mètre étalon fixé depuis
deux cents ans sur les murs du 36 rue de Vaugirard, au
Petit Luxembourg. Ils peuvent aussi se rendre à Sèvres et
réaliser ainsi le rêve de nombreux écoliers fascinés par
"le mètre étalon en platine iridié" dont on nous a appris
qu'il est conservé au Pavillon de Breteuil.
Le système décimal métrique a été introduit aux Antilles
et en Guyane vers 1825. Jusque là, et les utilisateurs de
statistiques ou documents anciens le savent bien, il
régnait la plus grande fantaisie dans les dénominations.
Malgré des noms semblables, les valeurs n'étaient que
rarement les mêmes. De nos jours, dans les milieux popu-
laires, il en reste encore des survivances charmantes mais
peu compréhensibles pour les profanes.
Commençons par les unités de longueur :
La toise, peu utilisée dans nos Iles, équivalait à 1,946 m
Le pas (ou plutôt "les pas") unité de mesure d'arpentage,
illustre la nécessité de toujours bien préciser le lieu
géographique considéré. Sa référence était "le Pied,
mesure de Paris". En Martinique, il valait trois pieds et
demi, soit 1,137 mètre. Mais à la Guadeloupe, il ne repré-
sentait plus que trois pieds, soit O,974 mètre. Le seul
"PAS" commun à toutes les vieilles colonies est le PAS DE
ROI qui servait à délimiter la partie littorale de 50 pas,
inconstructible, propriété du Roi. Noblesse oblige,
c'était un pas de géant qui valait cinq pieds, soit 1,64
mètre. Plus tard, cette partie s'appellera les "cinquante
pas géométriques".
Des longueurs, passons aux superficies :
Le nom commun était le carreau ou carré. On disait : je
possède 50 carrés de cannes ou 200 carrés en bois debout
(c'est-à-dire en forêt). Le CARRÉ est la superficie du
carré (d'où son nom) ayant cent pas de côté. Comme le pas
était différent d'un territoire à l'autre, un carré en
Martinique correspondait à une superficie de 1,2927 ha,
alors qu'en Guadeloupe il valait moins, et précisément
O,9496 ha.
Pour les unités de poids, l'homogénéité était plus grande.
Cela provenait probablement du fait que les transports
étaient effectués par des navires français vers les ports
métropolitains, en vertu de la règle de l'Exclusif.
Les termes employés sont souvent d'origine ancienne :
L'unité la plus courante était le boucaut, récipient en
bois, de la forme d'un tonneau, utilisé en général pour le
transport des marchandises sèches. On parlait d'un boucaut
de sucre, de riz ou de morue. Un boucaut est égal à 50 kg.
On utilisait également parfois la barrique (terme
d'origine gasconne) qui valait en principe 500 kg.
Il ne faut pas confondre avec la barrique destinée, en
Métropole, au transport du vin, qui avait une capacité
d'environ 200 litres.
La mesure de volume la plus couramment usitée était le
baril (terme d'étymologie gallo-romaine) d'une contenance
de 100 litres. Ici aussi, il ne faut pas confondre avec
l'unité de mesure des produits pétroliers; dans ce cas, le
baril vaut 159 litres.
Localement, et ce sont celles qui survivent encore dans
nos campagnes, on utilisait pour des petites quantités
d'autres unités de volume :
La musse, dont l'origine reste obscure, représente 1/8 de
litre;
Le quart ou roquille, valant 1/3 de litre. Je vous signale
que cette mesure est venue avec les premiers colons. On
l'utilisait, en effet, à Paris dès 1540, sous le même nom
de "roquille".
La chopine, appelée demi-pinte à Paris, représente O,466
litre... en principe. Je ne suis pas certain qu'un lolo ou
un privé vous délivrant une chopine de rhum mesure aussi
précisément !...
Une dernière unité tombée en désuétude était le quartaut.
Utilisé dès le XIIIème siècle, c'était un petit fût de
contenance variable en Métropole (57 à 137 litres). Pour
une raison que je ne saurais vous expliquer, arrivé aux
Antilles il n'équivalait plus qu'à une dame-jeanne de dix
litres.
Je présume qu'après cette énumération compliquée, vous
partagerez l'avis émis par Marquet en 1800, selon lequel :
"Il fallait apprendre le grec pour faire ses achats chez
l'épicier !".
La Révolution nous a bien simplifié la vie !
TROUVAILLES
de Michel Rateau : Un Pierrotin victime de la Terreur
in ARAH (Association de recherches Archéologiques et
Historiques du Pays de La Force), mairie de La Force
(24130), n° 5, juin 1993
Cet article de Michel Combet, de cinq pages, y compris
des "repères généalogiques" présente Elie-Henry (ou Elie-
Jean) CHANCEAULME de FONROSE, né le 20 mai 1738 à St-
Pierre d'Eyraud (Dordogne), fils de Jean CHANCEAULME de
St-MARTIN, conseiller du roi à l'élection de Périgueux, et
de Marie de LESPINASSE. Il épousa à Bordeaux en 1779 la
Martiniquaise Louise Catherine FIQUEPEAU (Cm Me Rauzan) et
en eut trois filles (épouses de SEGUR, CHANCEAULME et
SOULIER de LORTAL) et deux fils. Il fut guillotiné à
Bordeaux le 1er thermidor an II (19 7 1794), "coupable
d'aristocratie".
NDLR En fait, après lecture attentive de l'article, nous
en déduisons que "pierrotin" signifie "de St-Pierre
d'Eyraud, en Périgord" et non de St-Pierre de la Marti-
nique. Le lien de ce personnage avec la Martinique vient
de son épouse.
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Révision 28/12/2004