G.H.C. Numéro 71 : Mai 1995 Page 1348
INDEMNITÉ DE SAINT-DOMINGUE
Pierre Bardin
Michel Rateau nous a présenté dans le numéro 69 page
1299 la réclamation posée le 1er mai 1827 par Marie
Catherine de BLANC de SAINT-JUST pour toucher les
indemnités qu'elle estimait devoir lui être attribuées au
titre des dédommagements sur les habitations que possédait
son aïeule maternelle à Saint-Domingue. Il indique que le
dossier permet d'établir la filiation suivante :
1 Louis BERNARD, frère (?)
2 Marie Madeleine BERNARD, veuve
ax François LE VALOIS ou VOLAIS
bx François d'ALESME de MEYCOURBY
2a.1 Madeleine de VALOISON ou DEVALOLS
x Nicolas BLANC de SAINT-JUST (+ 17 7 1783)
2a.1.1 Marie Catherine de BLANC de SAINT-JUST
x Dominique d'ALESME
Je pense qu'il y a une erreur de position de croix à
la date du 17 7 1783. Ce n'est pas la date d'un décès mais
du mariage.
En effet, dans la série E/Supplément en Dordogne, on
trouve (E/630) le mariage, en 1783 dans l'église Saint-
Germain de Sorges, de messire Nicolas LEBLANC, chevalier
seigneur de SAINT-JUST, garde du corps du roi, habitant du
repaire noble de Vigé, avec demoiselle Françoise Marie
Madeleine LEVALLOIS, originaire de l'île St-Domingue.
Toujours dans cette paroisse , une fille sera baptisée en
1784, Marie Catherine, notre requérante. La maman y sera
inhumée "âgée d'environ vingt ans", en 1787.
Il nous faut consulter ce qui reste des registres de
Saint-Domingue pour mettre les choses en ordre.
Le 22 avril 1766, en l'église Notre-Dame des Cayes
(sud de St-Domingue), François LE VALLOY, natif de
Fontenay le Comte, paroisse Notre-Dame, province du
Poitou, fils de feu François LE VALLOY et de feu dame
Gabrielle CLAUDETTE, domicilié à Torbeck, épouse Catherine
BERNARD, native de la paroisse Notre-Dame des Cayes, fille
légitime et majeure de feu François BERNARD et Madeleine
VALLES (dans certains textes, on trouvera l'orthographe
VALLÉE, VALLAIS; de même LE VALLOY deviendra VALOIS, de
VALOIS, de VALOLS, LEVALLOIS).
De ce mariage naîtra à Torbeck, le 28 juin 1767,
Marie Madeleine LE VALOIS. Baptisée le 17 septembre, c'est
elle qui se mariera à Saint-Germain de Sorges en 1783.
François LEVALLOIS, le père, décède à Torbeck le 22
janvier 1774; on le dit âgé d'environ 50 ans.
Sa veuve, dame Marie Catherine BERNARD, se remariera
à Torbeck le 18 février 1776, avec François d'ALESME,
natif de Meycourby, paroisse de Bassillac en Périgord,
fils de Joseph d'ALESME seigneur de Meycourby, et Sybille
GORRO (GORREAU est sans doute l'orthographe exacte).
Ce remariage est sans doute l'explication qui permet
de comprendre pourquoi on trouve la fille, issue du
premier hymen, en Périgord. Elle vient vraisemblablement y
trouver une "éducation distinguée", comme le voulaient les
moeurs de l'époque. Il faut également signaler que son
grand-père paternel, François BERNARD, qui se marie à
Notre-Dame des Cayes en 1733, est originaire d'une
paroisse du diocèse de Bordeaux, que je n'ai pu lire avec
précision : son nom serait Pri...
De la même manière, je ne sais pourquoi François
d'ALESME s'établit à Saint-Domingue. Sans doute y vint-il
comme militaire et il se laissa séduire par une veuve
avenante et aisée. Le cas n'est pas rare. On trouve
d'autres d'ALESME dans l'île; ils semblent bien établis,
notamment avec la famille PEMERLE.
Le mariage d'ALESME x BERNARD fut stérile et, le 22
août 1785, sur la paroisse des Cotteaux, inhumation de
"François DALEM de MACOURLY, âgé d'environ 48 ans, époux
de Catherine BERNARD, habitant aux Trois Rivières". Je
n'ai pas trouvé le décès de la veuve.
Dans sa demande d'indemnisation, Marie Catherine
BLANC de SAINT-JUST indique qu'en 1790 l'habitation
produisait 4 millions de coton, 30 millions de café, que
la valeur totale était de 400 à 500.000 francs. Elle cite
comme témoins messieurs BALIX et BOULÉ , MARO Hugues. Si
leur identification n'est pas trop difficile, les ortho-
graphes sont plus fantaisistes.
Rapidement, signalons à Notre-Dame des Cayes pour
cette époque le décès de Pierre BOULAYS en 1793 et, la
même année, le mariage de Michel Raimond BALLIX avec Anne
BOULAYS. Quant à MARO, il ne peut s'agir que d'un MARRAUD.
Je ne sais comment furent calculées les indemnités
mais, le 1er juin 1832, la demanderesse obtint, pour la
"caféterie Dalesme de Meycourby située aux Cotteaux
quartier des Trois Rivières", 3.250 francs comme seule
héritière de son aïeule ancienne propriétaire, Marie
Catherine BERNARD. Il n'est nullement question de coton. A
la même date, elle reçoit 333F 33 pour "un terrain dénommé
Saint-Just à la rivière des Mornes à Torbeck qui appar-
tenait à son grand-oncle Louis BERNARD. C'est le n° 1 de
la tentative de filiation de cette courte histoire qui, me
semble-t-il, résume assez bien ce que furent l'évolution
et la fin de la colonisation dans cette partie du monde.
SUGGESTION
de Pierre Charroppin : Ne pourrait-on trouver un jour dans
GHC un répertoire des principaux "outils de recherche"
relatifs aux Antilles et disponibles en librairie ainsi
que des thèses sur le sujet ?
NDLR Reprenez donc les index des articles de chaque année
à la rubrique "publications" ou à celle "comptes-rendus de
lecture" et vous trouverez votre bonheur.
Précisons pour ceux qui, lisant trop vite, n'ont pas
compris la différence entre les titres de nos rubriques,
que "Publications" cite sans commentaires (ou très
rapides) des livres récents; "Comptes-rendus de lecture"
fait le compte-rendu de livres récents; "Notes de lecture"
fait le relevé des noms antillais dans des publications en
général anciennes. Mais, pour raisons pratiques, l'index
des articles en fin d'année réunit "Notes et comptes-
rendus de lecture".
Rappelons que la rédaction ne peut publier que ce qu'on
lui envoie : que chacun soit donc attentif, signale ce
qu'il a découvert, sollicite les directeurs de thèses pour
être informé des travaux en cours ou terminés et envoie
listes et références précises.