G.H.C. Numéro 66 : Décembre 1994 Page 1216
FAMILLE LE SERRURIER, alias SMITH
(Aisne, Hollande, Londres, Caroline du Sud, Saint-Thomas, Saint-Domingue)
Henry B. Hoff
Pendant 25 ans, au XVIIIème siècle, la succession de
Pierre SMITH, marchand protestant à l'île de Saint-Thomas,
traîne en longueur. La succession est compliquée du fait
de la religion et de la nationalité des héritiers. Elle
est à l'opposé de la succession de Jean Listry" (GHC pp.
294-295), car, en effet, les autorités danoises ont cité
le cas LISTRY pour ne pas accorder aux trois héritiers
catholiques en France leurs 60 % de la succession univer-
selle de leur frère, Pierre SMITH, décédé à Saint-Thomas.
Pierre SMITH est né vers 1660, peut-être à Saint-
Quentin (Aisne), fils de Pierre LE SERRURIER et de Marie
LÉGER (cf. généalogie ci-après).
Comme Pierre LE SERRURIER, le fils a fait sa profession de
foi à la French Church, Threadneedle street, Londres, le 5
juillet 1682. Marie LE SERRURIER et Jacques LE SERRURIER
(la soeur de Pierre, et son mari qui était aussi leur
cousin) y ont fait leur profession de foi le 18 octobre
1682.
Pierre LE SERRURIER a reçu les lettres de "denization" (3)
à Londres, le 16 mai 1683, avec Jacques LE SERRURIER.
Quelque temps après, Pierre LE SERRURIER a changé son nom
pour "Pierre SMITH" qui est une traduction du "serrurier"
en anglais.
Pierre SMITH a émigré à Saint-Thomas après 1691,
semble-t-il, car on ne le trouve pas dans les "landlister"
(recensements) de 1688, 1690 ou 1691. Il s'est marié à
Saint-Thomas le 29 novembre 1694 avec Anna, veuve
d'Andreas CABAEN. Comme "Pieter SMITH et Anna SMITH", ils
ont rédigé en hollandais, à Saint-Thomas, le 13 novembre
1698, un testament en commun qui fait état d'un testament
précédent, rédigé le 5 janvier 1695 (qui n'existe plus).
Pierre SMITH laisse tous ses biens à son épouse Anna, si
elle lui survit, mais elle doit rembourser une dette à feu
son grand-père, c'est-à-dire à sa grand'mère, dame Elisa-
beth BOSSU, veuve du sieur LÉGER. En cas de décès de la
grand'mère, sa femme devra payer 2.000 florins à sa soeur,
Lidia SMITH, demeurant à Londres, ou à ses héritiers.
Anna SMITH laisse tous ses biens à son époux, s'il lui
survit, et lui demande de faire un legs à Susanna JANSEN,
femme de Jan ROLLIERS, sa soeur, à Abraham ABRAHAMSEN, son
frère, à Ariaan ABRAHAMSEN, son frère et à Petronella
SALOMONS, fille d'Abraham SALOMONS.
Anna SMITH est décédée le 30 novembre 1710, et donc
Pierre SMITH a rédigé un nouveau testament, le 3 janvier
1711, à Saint-Thomas, avec les legs suivants :
1. A sa soeur, Lydie SIMMONS, épouse de M. Thomas SIMMONS,
pasteur, demeurant à Londres : 1.000 poids payables de ses
fonds à Londres;
2. A son beau-frère, Arian ABRAHAMSEN, pour son amitié et
celle de sa famille : 1.000 pistoles;
3. Aux héritiers de feu Engel BEVERHOUT et de Susannah
JANSEN, son épouse, soeur de feue sa femme : 2.000
pistoles;
4. Aux enfants de feu Abraham ABRAHAMSEN, son autre beau-
frère : 1.000 pistoles;
5. A son cousin, Pierre GINILLIAT : 1.000 pistoles, si son
oncle, Jacques SMITH, beau-frère du testateur, le consi-
dère comme capable d'utiliser cette somme avec soin;
6. A Abraham ABRAHAMSEN, la même somme, sous l'autorité de
son père.
Le reste de ses biens devait être divisé en cinq
parts, payables également à ses frères et soeurs (ou leurs
héritiers), de la façon suivante :
1. Son frère, Josias LE SERRURIER, demeurant à Saint-
Quentin, France;
2. Sa soeur, Elisabeth LE SERRURIER, épouse de Daniel de
CLEUES, demeurant à Paris;
3. Son beau-frère, Jacques SMITH, demeurant ici, pour ses
enfants nés de sa soeur Marie;
4. Sa soeur, Madeleine LE SERRURIER, épouse de Jacques du
MOUTIER de VABRE, demeurant à Saint-Quentin, France;
5. Sa soeur Lydie, épouse de Thomas SIMMONS.
Le testateur demande que les héritiers de France
rendent compte des sommes qu'ils lui doivent sur la suc-
cession de feu son père. Il nomme son beau-frère Jacques
SMITH, comme exécuteur testamentaire.
Pierre SMITH est décédé à Saint-Thomas le 11 ou le 12
janvier 1711, et sa succession ne s'est pas faite rapi-
dement, comme on pourra le constater par la chronologie
suivante :
26 juin 1711
Le gouverneur de Saint-Thomas, Michel CRONE, écrit ce qui
suit : "Pierre SMITH est décédé le 11 janvier et son
épouse le 30 novembre. Après le décès de sa femme, Pierre
SMITH à rédigé un nouveau testament mentionnant ses
propres héritiers, tous étrangers, en Grande-Bretagne, en
France et à Saint-Domingue (le fils d'une soeur défunte).
Puisque ce testament n'a jamais été confirmé par le
gouverneur, selon le système danois, le testament commun
du 13 novembre 1698 reste valide. D'ailleurs, les
héritiers de l'épouse de Pierre SMITH ne sont pas
satisfaits du nouveau testament.
En 1716
Un représentant des héritiers de France est venu à Saint-
Thomas engager des négociations avec l'exécuteur testa-
mentaire. Il s'agissait d'un certain M. LE JEUNE, c'est-à-
dire Joseph Jérôme Alexandre LE JEUNE (GHC p. 212). Il en
est résulté un accord en date du 13 novembte 1716 entre
MM. LE JEUNE et Jacques SMITH.
Avril 1719 : Jacques SMITH est mort.
Entre 1719 et 1732
Les héritiers de France ont assigné leurs droits à Charles
CROMMELIN à New York, d'une famille de Saint-Quentin dont
les membres étaient parrains et marraines d'enfants LE
SERRURIER (cf. ci-dessous). D'ailleurs, Charles CROMMELIN
est un parent des héritiers de France, car sa grand'mère
maternelle était Catherine BOSSU, épouse de Pierre
TESTART. Il est donc possible qu'il soit leur cousin issu
de germains.
5 mai 1732
Enfin, la chancellerie danoise octroie l'autorisation à
Charles CROMMELIN de recevoir "son héritance" du cours de
succession à Saint-Thomas.