G.H.C. Numéro 64 : Octobre 1994 Page 1157
Maison royale d'éducation des jeunes demoiselles
de la colonie : Versailles (Prospectus)
Source : Almanach de la Guadeloupe et dépendances pour
l'année bissextile. 1844. communiqué par Jean-Paul Hervieu
Cette maison, instituée par ordonnance locale du 17
octobre 1822, est régie par les Dames religieuses de la
Congrégation de Saint-Joseph, pour y diriger l'ensei-
gnement des demoiselles : elle est sous la surveillance du
Directeur de l'intérieur, la protection et l'autorité du
gouvernement.
Le Pensionnat, nouvellement placé sur l'habitation appelée
Petit-Versailles, est très agréablement situé. Le local
affecté à cet établissement renferme des bâtiments vastes,
convenablement distribués, et dont la solidité reconnue ne
laisse rien à craindre pour la mauvaise saison. Une
chapelle particulière, des terrasses spacieuses, un beau
jardin, une salle de bains, ainsi que des eaux saines et
abondantes sont destinées à l'usage des élèves.
La partie physique de l'éducation est très soignée. La
santé, la propreté, la bonne tenue des enfans, une nourri-
ture saine et abondante, les secours et les précautions
nécessaires à leur âge et à leur tempérament, sont l'objet
d'une attention toute particulière. En cas de maladie, on
leur prodigue les soins les plus assidus, une sollicitude
qui ne laisse rien à désirer à la tendresse maternelle.
Inspirer aux jeunes personnes, avec la simplicité des
moeurs, le respect et l'amour de la religion, former leur
coeur à la vertu, et orner leur esprit par l'étude des
sciences utiles, tel est le but de toute institution sage.
Leur procurer les talens innocens et les arts d'agrément
qui peuvent rendre leur société plus douce et leur vertu
plus aimable. Tel est le voeu des parens : c'est aussi le
voeu de la religion, et c'est celui des Dames de cette
Maison.
Objets de l'enseignement
On donne d'abord à la religion toute l'importance qu'elle
mérite; elle entre dans le plan d'études de toutes les
classes, sous la surveillance de M. le Préfet apostolique
et sous celle, plus immédiate, de M. le Curé de paroisse.
Les autres objets d'enseignemens sont : la lecture,
l'écriture, le calcul, la langue française, les éléments
de littérature nécessaires pour former le goût et le style
des élèves, l'histoire, la chronologie, la mythologie, la
géographie et une notion de la sphère.
Les élèves sont de plus exercées à tous les ouvrages
manuels, tels que la couture, la broderie et autres conve-
nables à leur sexe, et dirigées vers les soins qu'une mère
de famille doit connaître.
Les arts d'agrément entrent dans le plan de l'éducation.
Il y a tout les ans, dans la huitaine qui précède les
vacances, un concours et une distribution de prix : l'un
et l'autre sont publics, mais on ne peut y être admis
qu'avec des billets.
Indépendamment des prix ordinaires, il en est accordé un
d'application. Le prix de sagesse est une couronne de
roses, accordée à la pluralité des voix des élèves, avec
l'approbation des maîtresses.
Il est en outre distribué, tous les trois mois, des
médailles d'encouragement aux élèves dont la conduite et
l'application méritent cette récompense.
Régime de la Maison
La surveillance est exacte et continuelle dans tous les
temps et dans tous les lieux; on ne perd jamais de vue les
élèves : plusieurs maîtresses couchent dans les dortoirs.
On emploie avec ménagement le ressort puissant de l'ému-
lation; tout se réduit à l'appareil d'une distinction
marquante, soit pour l'éloge, soit pour le blâme.
L'exemple des compagnes, le concours des élèves, les répé-
titions, les exercices, sont les moyens dont on se sert
pour aiguillonner le courage et exciter le talent. Les
notes journalières, les médailles de chaque trimestre, les
prix et les couronnes à la fin de l'année, sont la récom-
pense des efforts et des succès. La couleur de la ceinture
indiquera la classe à laquelle l'élève appartient.
On n'admet dans la Maison ni demi-pensionnaires, ni
externes, mais seulement des pensionnaires. Elles peuvent
voir leurs parens tous les dimanches, au parloir, depuis
quatre heures du soir jusqu'à six, en présence d'une des
Dames de la Maison.
Les pères et mères seuls peuvent entretenir leurs enfans
sans la présence de la Dame surveillante.
Chaque élève, si elle l'a mérité par sa conduite, obtient
(le premier mercredi de chaque mois, à cinq heures du
soir) un jour de congé pour sortir de la Maison, et y
entrer le lendemain, à six heures précises du soir, accom-
pagnée, tant pour la sortie que pour la rentrée, d'une
personne de confiance, préposée à cet effet par les parens
ou leurs représentans.
Tous les trois mois, les parens recevront un bulletin qui
leur rendra un compte exact de la santé, de la conduite et
des progrès de leurs enfans.
Conditions
Les élèves ne pourront être admises avant l'âge de six
ans, ni après avoir atteint celui de seize ans. Aucune ne
l'est sans avoir eu la petite vérole ou avoir été
vaccinée, et sans un certificat de médecin, constatant
qu'elle n'est point affectée de maladie qui puisse se
communiquer. Le médecin de la Maison donne des soins
gratuits aux élèves, dans le cas d'indispositions ou de
maladies légères seulement. Les cas de maladies graves
sont aux frais des parens, et lorsqu'ils veulent faire
traiter leurs enfans par des médecins à leur choix, ils
ont la faculté de les retirer de la Maison, pour les faire
soigner jusqu'au moment de leur rétablissement.