G.H.C. Numéro 58 : Mars 1994 Page 1004

UNE HABITATION AUX FONDS BLEUS
Lucile Bourrachot

(Analyse  d'un  acte  de 18 pages,  A.D.  Lot  &  Garonne, 
minutes du notaire Gayral, 3 E 320/28, 30 décembre 1790)

  Jacques LAFFITTE, l'un des juges du tribunal du district 
d'Agen,  ci-devant  lieutenant-général de la  sénéchaussée 
d'Agen,  chargé d'une procuration du sieur François TESSON 
cadet,  habitant  paroisse  Notre-Dame de la  Nativité  de 
l'Accul,  dépendance  du Cap,  lieudit des Fonds Bleus,  à 
Saint-Domingue,  par  acte  du 24 janvier  1789  (Boissié, 
notaire à Saint-Martin du Dondon),  transfère cette procu- 
ration à (nom en blanc) pour se substituer à lui et repré- 
senter  le  sieur  TESSON dans un acte à  passer  à  Paris 
devant le notaire Tiron, avec :
- dame Claire-Françoise MOTTE épouse de M. Armand-Bernard-
Honoré  BROUSSE,  demeurant à Paris,  veuve  en  premières 
noces  de  J.B.  LEGOUVÉ,  avec qui elle était commune  en 
biens;
- Gabriel-Marie-Jean-Baptiste  LEGOUVÉ,  majeur,  fils  et 
héritier dudit J.B. LEGOUVÉ, habitant Paris.

Exposé des faits :

Devant  Foacier,  notaire à Paris,  le 23 mai  1778,  J.B. 
LEGOUVÉ  donnait à ferme au sieur TESSON  (représenté  par 
sieur  Jean-Rémy DEBILLE,  bourgeois de  Paris,  procureur 
substitué de sieur Jean LANASPEZE,  négociant à Bordeaux), 
pour sept années à compter du 18 juin 1777,  moyennant 630 
livres de fermage annuel,  argent de France,  rendu net au 
domicile  de  LEGOUVÉ à Paris,  ladite habitation du  Fond 
Bleu,  avec  bâtiments  et  plantations,  ainsi  que  deux 
négresses et une négritte.  TESSON jouissait de ce bien en 
vertu d'un bail judiciaire de trois ans qui expirait le 18 
juin 1777. Suivent les clauses d'entretien "en bon père de 
famille", etc...

     Par le même acte LEGOUVÉ s'engageait à vendre  ladite 
habitation à TESSON.

Après  avoir payé exactement pendant les premières années, 
TESSON ne peut,  en raison de la guerre,  s'acquitter  des 
fermages jusqu'en 1786, ni en faire réaliser la vente. Les 
sept  années de bail s'achevèrent en 1784 et depuis TESSON 
continue  à jouir des biens par tacite reconduction  et  a 
proposé  de  les  acquérir au prix fixé de  12.000  livres 
augmenté de 2.000 livres comme juste indemnité de  retard, 
ce que les époux BROUSSE ont accepté.

Suit  le décompte des sommes dues,  payées ou à payer  par 
TESSON.  Certaines  de ces sommes ont été réglées par  Mme 
ASSELIN,  soeur  de  TESSON.  Par l'acte envisagé dans  la 
procuration,  le bail serait résilié et la vente réalisée. 
La plantation comporte 30 carreaux 2/3 où étaient plantés, 
en 1776, environ 18.000 pieds de café.

     J.B. LEGOUVÉ, qui avait passé contrat de mariage avec 
Claire-Françoise  MOTTE,  le  15  septembre  1763,  devant 
Bernard et Lenoir,  notaires à Paris,  avait hérité de  la 
plantation de son père (inventaire après décès de celui-ci 
le  17.01.1782,  Foacier notaire à Paris).  Par acte du 17 
mai 1786,  devant Tiron,  notaire à Paris,  partage de  la 
communauté ayant existé entre les époux LEGOUVÉ.

     La  plantation  avait  été achetée par  LEGOUVÉ  père 
(acte du 31 octobre 1775, Tiron, notaire) au sieur Antoine 
COLLEAU,  voiturier  à La Magdeleine-lès-Tournon en  Brie, 
moyennant  12.000 livres.  COLLEAU était  propriétaire  du 
Fond Bleu comme héritier unique de son fils Antoine-Louis, 
maître perruquier au Cap Français,  qui en avait acquis le 
terrain de sieur Lazare-Boniface BOYER, habitant de Saint-
Domingue,  lequel  le  tenait d'une concession de  MM.  de 
VAUDREUIL et LAPORTE LALANNE.

Jacques  LAFFITTE,  qui signe cette substitution de procu- 
ration,  était, d'après un autre document, un frère utérin 
de François TESSON.  Il était fils de Charles LAFFITTE  et 
de  Marie-Rose  CHIRON,  qui habitèrent au  Bonnet,  à  la 
Petite Anse.  Revenu en France,  Charles acheta une charge 
anoblissante  et  le domaine de la Joannenque à  Astaffort 
(47).  Son  fils unique,  Jacques,  dit de LAFFITTE de  la 
JOANNENQUE,  acheta  la  charge de lieutenant  général  au 
siège  sénéchal d'Agen.  Il épousa en 1788 une  demoiselle 
BÉRARD.  Je  suppose que François TESSON était le fils  de 
Marie-Rose CHIRON. Je serais intéressée éventuellement par 
quelques  renseignements supplémentaires sur  celle-ci  et 
sur  les  enfants  TESSON,  dans la mesure  où  cela  peut 
toucher l'Agenais.

TROUVAILLES

d'André Navari : Livres sur St-Domingue

    Je possède le livre de Victor Advielle "L'odyssée d'un 
Normand à St-Domingue au XVIIIe siècle" (Paris,  librairie 
Challamel,  1901,  292 p.).
  Il s'agit de Pierre LEFRANC de SAINT-HAULDE, architecte, 
ancien juré expert, entrepreneur des bâtiments au Châtelet 
de  Paris,  fils d'Isaac LEFRANC,  architecte du  roi,  et 
originaire  de  Quibou  près de  Saint-Lô.  Il  épousa  en 
premières noces Marie DRANCY, se fixa à Paris puis passa à 
St-Domingue en 1771.  Sa femme étant décédée à  Paris,  il 
épousa en secondes noces à Port-au-Prince, le 17 septembre 
1774,   Marguerite  FLEURY,   fille  de  Dion,   "marchand 
gasonnier des Menus Plaisirs du Roy",  et Jeanne GODAILLE, 
tous  deux décédés à Paris.  Sa seconde épouse meurt à son 
tour  en 1777.  Il retourne en France en 1781 et  meurt  à 
Soisy-sous-Etiolles.  Le  livre,  outre  la biographie  du 
personnage, la copie des actes de catholicité, de contrats 
de  mariage  et  la généalogie de  la  famille,  donne  un 
"aperçu général sur les travaux de la Grande-Rivière et la 
situation  de  la  colonie  à  cette  époque"  et   divers 
documents sur St-Domingue.
  
  J'ai   aussi  acquis  récemment  "Les  déportés  de  St-
Domingue", de Claude-Bonaparte et Marcel-Bonaparte Auguste 
(éditions Naaman,  Québec,  160 p.).  Il relate la  dépor- 
tation  de TOUSSAINT-LOUVERTURE et RIGAUD,  des  officiers 
d'état  major  et de soldats de l'armée insurgée en  1802, 
après la reddition de TOUSSAINT à LECLERC.  Malgré l'indé- 
pendance de 1803,  ces déportés ne furent jamais relâchés; 
certains s'évadèrent, quelques-uns rejoignirent les armées 
françaises,  beaucoup moururent dans les camps de  travail 
en Corse.





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