G.H.C. Numéro 57 : Février 1994 Page 978
COOPÉRATION
de Roselyne Bordais-Fraval : Laboureurs, engagez-vous (pp.
430 et 490)
J'ai pris connaissance par hasard du "traité de placement"
de cinq orphelins des hospices de Nantes au XIXe siècle et
j'ai pensé que recopier la liste des enfants et les
grandes lignes du traité pouvait apporter des informations
à d'éventuels descendants. Le document se trouve dans les
archives de l'Hôtel-Dieu de Nantes (A.D. Loire-Atlantique,
H3, série G22 "Service des enfants trouvés, orphelins et
abandonnés, admissions, entretien, placements, an 9 à
1839; 1840 etc.).
Traité de placement des orphelins des hospices nantais
pour la Guadeloupe
Le 9 8bre (octobre) 1849, Mr François-Auguste BELLAIN,
demeurant à Nantes, propriétaire, représente Mr Pitre
VINCE, négociant demeurant à la Guadeloupe, colonie
française, propriétaire de l'habitation dite Arnouville,
commune de Petit-Bourg.
Les enfants sont :
- Henri-Ferdinand, orphelin des hospices de Nantes, né le
9 avril 1835, enregistré à l'hospice d'Angers, n° matri-
cule 869, reçu aux hospices de Nantes le 7 novembre 1837,
n° d'enregistrement 378/1837, échange d'enfants avec les
hospices d'Angers.
- Henry-Paul, orphelin des hospices de Nantes, remis le 2
décembre 1837 par une sage-femme, enregistré le dit jour à
la mairie d'Angers n° 694 de l'hospice d'Angers, reçu aux
hospices de Nantes le 18 juin 1839, n° d'enregistrement
203/1839 (échange, comme le précédent).
- Arsène-Amant-Louis PARENT DUSAC dit Séverin VERNèS,
orphelin des hospices de Nantes, exposé dans le tour de
l'Hôtel-Dieu nantais le 11 février 1835 avec un billet où
étaient écrits ses noms et prénoms, plus un ruban bleu au
bras gauche de l'enfant naissant, enregistré à la mairie
de Nantes le 13 février 1835, inscrit sur le registre des
enfants trouvés sous le n° 43/1835.
- François-Jean-Théodore PEIGNET, orphelin des hospices de
Nantes, n° de matricule 428/1844, le 1er mars 1844, en
vertu d'un arrêté de Mr le préfet de Loire-Inférieure du 7
février 1844, en qualité d'orphelin indigent, né à
Guenroüet (Loire-Inférieure) le 22 mars 1838, fils de feu
Pierre PEIGNET et de feue Geneviève HERVÉ, complètement
abandonné par suite du décès de ses père et mère.
- Fernand BOUQUET, n° matricule 1800/218/1833 d'enfant
trouvé, exposé le 26 juillet 1833 à 9h 1/2 du soir dans le
tour de l'Hôtel-Dieu de Nantes, sans renseignements sur
lui, déclaré à la mairie de Nantes le 1er août 1833.
Extraits du traité de placement des cinq orphelins
Les cinq orphelins ayant fait leur première communion,
Mr Pitre VINCE veillera à ce qu'ils soient instruits dans
la religion catholique et qu'ils remplissent les devoirs
de cette religion. Il prend à sa charge les frais de
voyage de Nantes à la Guadeloupe de chacun des cinq jeunes
gens.
Les orphelins commenceront leur travail de leur jour
d'arrivée à destination jusqu'à 21 ans. Ils auront des
gages. Ils garderont les bestiaux, cueilleront les herbes
et feront tous travaux de leur force et âge, labourer la
terre, bêcher, planter des eaumes (?), claircer (?), fumer
et épailler, couper les cannes, les conduire, les passer
au moulin, faire le sucre, tout ce qui concerne la culture
et la fabrication du sucre et du tafia.
Mr P. VINCE fournira obligatoirement le logement, la
nourriture, entretiendra le linge et les vêtements néces-
saires, les soignera en santé comme doit le faire un bon
père de famille.
Si une maladie de plus de six mois est jugée incurable
par un certificat signé de deux médecins, l'orphelin
pourra être renvoyé en France. La moitié des frais sera à
sa charge ou à celle des hospices de Nantes si on ne peut
obtenir son retour par le gouvernement de la Guadeloupe.
Si l'orphelin devient incurable par accident, blessure
grave ou privation d'un membre, le propriétaire lui devra
une somme qui ne pourra être inférieure à 200F, en sus des
gages déjà acquis, et le renverra en France.
Les gages seront payés en France sur un livret ouvert à
la Caisse d'Epargne de Nantes, au nom de l'orphelin. Le
dit livret restera sous la responsabilité des hospices de
Nantes jusqu'à la majorité de chacun des cinq orphelins.
Le montant sera de 90F les deux premières années, 120F les
3e et 4e années, 140F les 5e et 6e années, 200F la 7e et
dernière année, ainsi que 50F de prime du gouvernement au
profit de chaque engagé, mis immédiatement à la Caisse
d'Epargne de Nantes.
Le planteur ne peut céder l'orphelin à un autre
planteur, à moins que ce ne soit par suite d'aliénation de
l'habitation et que le propriétaire ne possède pas d'autre
habitation sur la colonie. Si le planteur ne peut placer
l'orphelin chez son successeur ou bien chez un autre
planteur, il s'oblige à supporter les frais de retour en
France. En cas de décès du propriétaire, les héritiers
auront les mêmes obligations morales et financières envers
les orphelins et les hospices de Nantes.
La tutelle de l'orphelin est assuré par le maire de la
commune de Petit-Bourg en Guadeloupe, remise en ses mains
par le premier magistrat de l'Hôtel de ville de Nantes.
Si les parents réclament l'orphelin, les frais du
voyage seront à leur charge si le gouvernement ne veut pas
faire le rapatriement.
NDLR Nous remercions vivement Roselyne Bordais-Fraval,
membre du Centre Généalogique de l'Ouest, d'avoir pris la
peine de recopier et de nous envoyer ce document excep-
tionnel, qui vient si bien compléter celui trouvé par
Pierre Bardin en novembre 1991, document qui datait de la
même année 1849 et qui concernait donc bien l'habitation
de Petit-Bourg, identifiée par Nicole Imbert.
Il faut remarquer dans ce traité l'emploi du terme
"engagé". Il s'agit en effet d'un véritable engagement
(comme dans l'acte trouvé par Pierre Bardin), sur le
modèle de ceux des XVIIe et XVIIIe siècles mais beaucoup
plus circonstancié et pour sept ans au lieu de trois.