G.H.C. Numéro 54 : Novembre 1993 Page 901
COMPTE RENDU DE LECTURE P. Bardin
Haïti, une colonie française. 1625-1802
Denis Laurent-Ropa L'Harmattan, 170F
En 1492, Christophe COLOMB découvre une île qu'il
nommera Hispanola. Ce nom sera vite oublié pour celui de
Santo-Domingo et, pour ce qui nous intéresse, "La partie
française de Saint-Domingue"; enfin, le 1er janvier 1804,
l'acte d'indépendance lui donne le nom d'Haïti qui était
le sien avant Christophe COLOMB. Entre ces deux dates, 312
ans qui commencent par le massacre des indiens, l'asser-
vissement de milliers d'hommes, pour finir par d'autres
massacres, on peut même parler de génocide, et la
destruction totale et définitive de ce qui était le
fleuron financier, économique et agro-industriel de la
France sinon de l'Europe.
Ecrire cette histoire en un seul volume n'était pas
chose facile. Pas par manque de documents, ils abondent,
ainsi que les récits, les rapports en tous genres et les
parutions de toutes espèces. Denis Laurent-Ropa nous
raconte cette belle et terrible histoire en allant à
l'essentiel contenu dans 341 pages très denses, qui satis-
feront l'honnête homme curieux de l'histoire de son pays.
Universitaire, diplomate, journaliste, attaché culturel
à Santo-Domingo de 1945 à 1958, l'auteur put, de ce fait,
se rendre souvent en Haïti. Il connut donc le régime du
président MAGLOIRE; ensuite vinrent les DUVALIER... Modes-
tement, il intitule son ouvrage "essai historique". Il
comporte quatre parties que l'on peut comparer aux quatre
mouvements d'une symphonie tragique : 1er, St-Domingue,
l'Haïti français, 2ème, le pouvoir colonial : le sucre
roi, 3ème, l'ordre noir pèse sur tout St-Domingue :
TOUSSAINT, BONAPARTE, 4ème, l'expédition française, 1801-
1803. A chaque fin de chapitre se trouvent les références
bibliographiques, où figurent évidemment ceux que l'on
peut nommer les Pères fondateurs de cette histoire
(Charlevoix, Labat, Moreau de Saint-Méry, Oexmelin, G.
Debien, Price Mars, P. Pluchon, Schoelcher, A. Métral...),
les sources manuscrites avec, en tête, les séries CC/9a et
9b des colonies, les papiers de St-Domingue conservés aux
Manuscrits de la B.N., l'Archivo general de Indias, etc.,
sans oublier les cartes et plans qui permettent de situer
les lieux de cette "Isle et Côte de St-Domingue" (ainsi
dénommée dans tous les documents, notariés entre autres)
qui ne représentait qu'un tiers de Santo-Domingo.
Si le récit est passionnant, il est quelques erreurs
qui eussent pu être évitées lors de la relecture. Par
exemple, p. 107, MM d'OGERON et DUCAFISE (pour DUCASSE);
p. 141, Benjamin FLEURIAN (pour FLEURIAU); p. 183, l'habi-
tation du comte de NOEL (pour Pantaléon comte de NOE, dont
l'habitation Bréda portait le nom de sa mère et où vécut
Toussaint BRÉDA avant de se nommer LOUVERTURE) ou encore
BARON LIBERTAT (pour BAYON LIBERTAT); p. 197, le commis-
saire général de la marine MALOU (pour MALOUET), etc. Une
prochaine édition devrait gommer ces défauts qui agacent
comme le grain de sel superflu irrite la gencive.
Le titre mérite qu'on s'y arrête un instant. Stricto
sensu, il ne me semble pas que l'on puisse écrire "Haïti,
une colonie française", même si ce nom, Haïti, a cheminé
(comment ?), ignoré, de la découverte à la révolte libéra-
trice, pour effacer dans la mémoire des hommes toute trace
de la terre d'asservissement qu'avait été St-Domingue.
NOTES DE LECTURE Pierre Baudrier
Les officiers de l'armée royale combattante de la guerre
d'Indépendance des Etats-Unis. De Yorktown à l'an II
Gilbert Bodinier
Vincennes, Service historique de l'armée de terre,
1983, VII-593 p.
p. 62, n. 4 "BEAUMONT d'AUTICHAMP, qui avait une
plantation à St-Domingue, demanda le commandement d'un
régiment qui stationnait dans les îles. Il fut nommé à la
tête d'Agenois qui était en garnison au Cap. Il demanda
ensuite, en 1781, que son régiment quitte cette ville pour
aller à Port-au-Prince, disant que, depuis 1776, son
régiment avait déjà perdu 1.100 hommes et 15 officiers :
"Mon régiment s'y enterrera en entier si il y reste,
d'autant qu'il occupe les casernes les plus malsaines sur
le bord d'un marais." Mais n'est-ce pas aussi parce que sa
plantation se trouvait à Port-au-Prince ? Par la suite, il
demanda que LILLANCOURT fût nommé dans la partie sud de
St-Domingue, VINCENT dans celle du nord et lui à l'ouest,
cet arrangement permettrait à chacun de se rapprocher de
son habitation (Arch. nat. E13 Colonies)".
p. 64 "un roturier authentique : le marquis de ROUVROY
(20). Il est né en 1733... a obtenu un brevet de colonel à
St-Domingue en 1768."
note 20 : "il est le fils du sieur Jacques LE NOIR,
notaire royal et procureur fiscal de Boynes" (Loiret).
p. 66 "DUBOIS-MARTIN, qui sert comme volontaire dans les
troupes de St-Domingue, a été proposé en vain pour être
nommé sous-lieutenant en 1770... Il fut enfin nommé
lieutenant de Port-au-Prince le 25 novembre 1773".
p. 71 "NADAL apparaît sous les prénoms de Jean-Laurent,
né le 27 12 1730, et d'Antoine-Xavier, né le 13 12 1733.
La personne qui a constitué leur dossier a rassemblé leurs
papiers dans une seule chemise qu'elle a intitulée
"dossier des frères NADAL". Un seul personnage est caché
sous les deux identités (43).
note 43 : Serv. hist., généraux en émigration."
p. "LERIGET de CHATEAU-GAILLARD, fils d'un garde du
corps, nommé sous-lieutenant au régiment de Touraine, à
St-Domingue, le 26 juillet 1781."
p. 118 "BOURNEUF est passé à St-Domingue en 1764 (134)
note 134 : Arch. nat. E48 Colonies."
p. 118-119 "Jacques François Marie REY a été nommé aide-
major des troupes des colonies par REYNAUD, gouverneur de
St-Domingue, son beau-père... Le ministre refusa de
ratifier cette nomination".
p. 120 "DARROT, nommé lieutenant au régiment de
Pondichéry, en 1772, n'a jamais joint son corps et a été
nommé colonel à St-Domingue dès 1774 sans passer par le
grade de capitaine. En marge de sa nomination on a écrit
que "sa mission est une faveur marquée et un acte de
complaisance pour M. d'HÉROUVILLE son beau-frère. Il ne
connaît pas la colonie et n'a jamais fait la guerre" (142)
note 142 : Serv. hist. dossier maréchal de camp 3461."
p. 133 "GIMAT, né en 1747, de très petite noblesse, s'est
distingué en Amérique et a été nommé major d'un régiment
provincial en 1779 puis colonel du régiment de la Marti-
nique en 1782."
p. 133 "AMIDIEU DUCLOS, né en 1756, ss-lt de milice en
1768, volontaire au régiment du Cap le 30 11 1774, demanda
le 24 8 1776, puis le 1 8 1778, à être nommé officier."