G.H.C. Numéro 33 : Décembre 1991 Page 448
Famille CELLE (Guadeloupe)
Yvain Jouveau du Breuil
L'étude de cette famille est un exemple de la nécessité
d'une recherche minutieuse, scrupuleuse et très patiente
dans le petit nombre d'archives que nous avons à notre
disposition pour le XVII°siècle, dans lesquelles le
moindre indice a son importance.
J'ai commencé cette étude en dépouillant les registres
paroissiaux des Vieux-Habitants parvenus jusqu'à nous et
débutant le 24 novembre 1692, j'y ai retrouvé trois actes
concernant cette famille:
- Mariage d'Elisabeth CELLE
- Mariage de Philippe CELLE
- Décés d'Elisabeth CELLE épouse LESUEUR
Les deux actes de mariage sont très succints et ne nous
donnent pas les parents des mariés. Remarquons au passage
que le premier acte dit qu'Abraham LESUEUR est natif de la
paroisse alors qu'il est natif de Dunkerque, erreur qui
peut avoir son importance quand on ne peut faire le recti-
ficatif. Ces deux actes nous apprenent que Philippe et
Elisabeth sont de la paroisse des Vieux-Habitants, sous
réserve d'une autre erreur.
L'acte de décés permet de connaître l'âge d'Elisabeth et
donc l'année approximative de sa naissance soit 1675/6,
dans la mesure où l'âge est exact, ce qui n'est pas
toujours le cas.
En étudiant de façon minutieuse tous les actes des
registres du quartier je découvris l'acte de baptême, du
13 décembre 1704, de Marie Magdeleine LEPINARD (autre
famille du quartier sans relation directe avec celle qui
nous intéresse) dont la marraine était Dlle Marie
Magdeleine (et non Angélique comme sur l'acte de mariage)
CORNEAU veuve du Sieur CELLE et un autre acte de baptême
du 31 janvier 1712 de Pierre FILLON fils de Pierre
Silvestre et Dlle Magdeleine CORNAU. Grâce à ces deux
nouveaux actes nous pouvons dire que Philippe CELLE est
décédé avant le 13 décembre 1704 soit 3 mois après son
mariage, et que sa veuve se remaria avant avril 1711.
L'étude de la famille CORNEAU nous confirme que Marie
Angélique et Marie Magdeleine sont bien une seule et même
personne.
Les parrainages des enfants LESUEUR semble indiquer que
Philippe et Elisabeth étaient frère et soeur.
Il fallait maintenant trouver leurs parents; j'étudiais
alors les autres documents du XVII° siècle à savoir le
recensement de 1671 qui n'apporta rien; et le recensement
de 1664, dans lequel est cité dans l'escouade d'Adrien
HEUDDELINE (quartier des Vieux Habitants), dans la case de
Philippe Le BRUN, capitaine de milice, Françoise de
LAPLANCHE, sa femme, et Robert SELLE, 14 ans, fils de son
premier mari. Même nom patronymique, malgré la différence
orthographique mais n'oublions pas qu'à l'époque l'écri-
ture était phonétique; et il aura 25/26 ans à la naissance
d'Elisabeth, tout ceci concorde bien pour qu'il soit le
père de Philippe et Elisabeth.
Je repris alors le recensement nominatif de 1671 pour le
même quartier et retrouvai Philippe Le BRUN et Françoise
de LAPLANCHE avec un fils, peut être Robert ou un enfant
issu de ce nouveau couple, Robert ayant dans ce cas
disparu, soit qu'il fut décédé soit qu'il eut quitté
l'île.
Dans le terrier de ce même recensement, Philippe Le BRUN
possède deux habitations voisines:
- 100 pas de large sur 1000 pas de haut, avec deux cazes,
dont 250 pas sont cultivés en pétun, 50 pas en coton et le
reste est laissé en savanne. Elle est bornée par l'habi-
tation de Jean LESPINARD, les 50 pas de réserve (c'est-à-
dire les 50 pas du Roi, en bordure de mer), le dit Lebrun
et la rivière des Viels habitants.
- on ne connaît pas la superficie de la seconde qui est
en bois debout et en halliers, et bornée par le dit
LEBRUN, les 50 pas de réserve, Pierre MAILLARD et le dit
MAILLARD.
C'est en étudiant les limites des autres habitations, et
en particulier celle de Jean LESPINARD, bornée d'un côté
par l'habitation de Robert SELLE et qui en fait correspond
à la première des deux habitations décrites ci-dessus, que
nous pouvons dire que le garçon recensé est bien Robert
SELLE.
Il nous restait deux autres documents à consulter:
- l'incontournable liste de l'Espérance (1) publiée par
Bernadette et Philippe Rossignol, qui nous livre le nom
d'Alfonse de CELLE, probablement le premier époux de
Françoise de LAPLANCHE,
- et enfin la liste des habitants qui contribuèrent au
financement des fortifications de l'île en 1686, dans
laquelle se trouve Robert SOSSE.
Nous voici donc avec les trois générations de cette
famille à la Guadeloupe.
Restait à déterminer l'épouse de Robert SELLE, c'est le
point qui m'a posé le plus de difficultés et ma conclusion
est réservée. Pour cela j'ai repris tout l'état civil du
quartier acte par acte et j'ai remarqué qu'une personne
revenait souvent comme témoin ou parrain dans les actes
des familles Celle et Lesueur. Il s'agit de Guillaume
BOUCHU, habitant au même quartier, époux de Marie Angé-
lique THEROUDE dont il eut deux enfants nés après 1688, et
pour lesquels le seul acte baptistaire existant est celui
de sa fille Marie Angélique dont le parrain est curieu-
sement Felippe CELLE. Elle épousera en 1711 Mathurin de
BACHELIER, écuyer, major de la Guadeloupe, et ils furent
parrain et marraine d'un enfant issu du couple Celle-
Le Sueur. Abraham Le Sueur, cornette de cavalerie sera en
1722 parrain d'une fille issue du couple de Bachelier-
Bouchu.
Les deux enfants CELLE, Philippe et Elisabeth sont nés
avant 1680, les enfants BOUCHU sont nés après 1688, je
suppose donc que Marie Angélique THéROUDE qui est née vers
1649 d'après le recensement de 1664, épousa en premières
noces, après 1671, Robert SELLE, puis veuve vers 1686/8,
elle épousa en secondes noces vers 1688 Guillaume BOUCHU;
elle même décéda entre 1702 et 1704.
Révision 26/08/2003