G.H.C. Numéro 30 : Septembre 1991 Page 384
Nicolas LEROY DU Mé
Bernadette et Philippe Rossignol
Un des capitaines du "périple aventureux" de 1618,
commandant la "Sainte Suzanne", de 30 tonneaux, un des
quatre vaisseaux de l'expédition de 1618, se nommait DU
MAIS. J.P. Moreau l'identifie à Nicolas LE ROY sieur DUMé
dont parle Philippe Barrey dans "Les origines de la colo-
nisation française aux Antilles" (Société havraise
d'études diverses, 1918). Or c'est aussi le nom d'un des
premiers habitants de Capesterre de Guadeloupe qui est
probablement son fils. Nous vous présentons ci-après ce
que nous savons de ces deux personnages, en espérant que
certains d'entre vous pourront compléter par d'autres
renseignements.
D'après Philippe Barrey, Nicolas LEROY sieur DUMé
naquit à Saint-Gomer de Fly, évêché de Beauvais, en fait
Saint-Germer de Fly, dans l'Oise. Or, Saint-Germer de Fly
n'est qu'à 8 km de Gournay-en-Bray, en Seine-Maritime, où
se trouvait le fief du Petit-Pré appartenant à Louis
HOUEL, sieur du Petit Pré, père de Charles HOUEL seigneur
propriétaire et gouverneur de la Guadeloupe ! Ce fait est
à retenir.
Signalons au passage que les restes de l'abbaye de
Saint-Germer, fondée au VII° siècle, avec l'église du XII°
siècle et sa Sainte Chapelle du XIII° forment un ensemble
de toute beauté dont nous vous recommandons la visite!
Nicolas LEROY sieur DUMé fit toute sa carrière dans
la marine. En 1621, il porta à Québec des lettres de Louis
XIII; en 1629, il fut vice-amiral de l'escadre de navires
de guerre commandée par François de ROTONDY, écuyer, sieur
de CAHUSAC, qui alla porter secours aux français de la
toute jeune colonie de Saint-Christophe. LEROY DUMé avait
fait construire, à Dieppe, cinq des vaisseaux de cette
flotte, ayant racheté le 8 mars 1627 le marché passé par
Jacques SOULAS, marchand à Dieppe, avec RICHELIEU. En
1635, il fut appelé par RICHELIEU pour être capitaine en
la marine; en 1644, il reçut commission de chef d'escadre
et fut chef d'escadre de Guyenne puis de Normandie. Il
passa la fin de sa vie au Havre où il fut inhumé le 17 4
1655 (paroisse St-François).
Ce serait donc lui le "capitaine DU MAIS" du manuscrit
de Carpentras, parti de Dieppe en 1618 et rentré en France
après un arrêt à Sainte-Lucie en février 1619.
La généalogie de la famille de VIPART nous apprend
qu'il avait deux frères, Pierre et Charles LEROY sieurs du
Mé qui furent capitaines des vaisseaux du Roi, le premier
de 1632 à 1645 et le second de 1641 à 1648.
D'après cette même généalogie de Vipart, Nicolas
LEROY DUMé, le chef d'escadre, eut pour fils Nicolas LE
ROY sieur du Mé et d'APLEMONT, seigneur et patron de Saint
Laurent de Brévédent et d'Ecquetot en la Vicomté de
Montivilliers, qui servit comme capitaine des vaisseaux du
Roi de 1647 à 1668. En considération de ses services il
eut des lettres de noblesse datées de La Fère en août
1656, confirmées par d'autres lettres à St Germain en Laye
en février 1668.
L'autre Nicolas LEROY DUMé, celui de Guadeloupe,
serait, toujours d'après la généalogie de Vipart, fils du
capitaine des vaisseaux du roi et petit-fils du chef
d'escadre. Or il est né vers 1615 puisqu'il est recensé en
1664 à Capesterre de Guadeloupe âgé de 48 ans. Il semble
difficile de croire que son père ait pu être capitaine de
vaisseaux de 1647 à 1658. On se trouverait avec une
génération de trop. Ne l'aurait-on pas introduite pour
donner une ascendance noble à l'époux d'une demoiselle de
VIPART ? Nous laissons à ceux qui s'intéressent à la
généalogie de VIPART le soin d'éclaircir ce point.
Le RP Dutertre parle à plusieurs reprises du Capitaine du
Mé de la Capesterre, mais pas toujours en bons termes,
ayant eu à en souffrir! (1)
- Le 14 juillet 1639, il signe, avec d'autres officiers et
habitants de Guadeloupe, une lettre disant qu'ils empê-
chent le départ du RP BRETON.
- Le 7 octobre 1644, il fait partie de ceux qui refusent
comme gouverneur de Guadeloupe le sieur de LEUMONT, Inten-
dant de la Compagnie, nommé par POINCY en remplacement de
MARIVET à qui Charles HOUEL, gouverneur de Guadeloupe
alors en France, avait confié l'intérim.
- Le 22 août 1645, il se plaint d'avoir reçu un coup de
bâton du sieur MARIVET, lieutenant civil et criminel de
Guadeloupe.
- Le 23 août 1645, il est nommé conseiller au Conseil
Souverain de Charles HOUEL (mais il ne figure pas sur la
liste des membres du conseil de HOUEL dans Colonies F3/18)
- En septembre 1646, il fait partie, pour le quartier de
la Capesterre, de ceux qui commandent la sédition organi-
sée par HOUEL contre le lieutenant général de THOISY. A
cette occasion il met à la porte avec violence le RP
Dutertre qui voulait calmer les esprits.
- Le 18 octobre 1648, envoyé par HOUEL, il prend posses-
sion des îles des Saintes, jusqu'alors inoccupées.
- Fin 1653 il est envoyé par HOUEL en expédition punitive
contre les Caraïbes de la Dominique qui avaient massacré
les français de Marie-Galante.
D'après tous ces témoignages de DUTERTRE, il apparaît
clairement qu'il est dans la mouvance de Charles HOUEL. Or
leurs pères à tous deux étaient de la même région, comme
nous l'avons signalé plus haut.
Nicolas LEROY DUMé avait épousé Marie DU CHILLAU,
veuve de François TREZEL. Ce dernier, "hérétique", avait
été envoyé par la Compagnie en 1639 à la Martinique pour
"faire du sucre". Il passa ensuite en Guadeloupe, attiré
par HOUEL, qui le fit membre de son Conseil le 23 août
1645 (comme le sieur DUMé). DUTERTRE raconte en détail les
circonstances de sa mort, fin 1648 : après le départ de
THOISY, il règnait une "persécution universelle" dans les
îles, et en particulier en Guadeloupe, entre partisans de
THOISY et partisans de HOUEL.
"Il y avait à la Capesterre de cette île un lieutenant
appelé LA FONTAINE pied d'Orion, à cause qu'il était
estropié et portait une jambe en écharpe avec une bande de
cuir; ce LA FONTAINE qui avait été au commencement fort
Révision 26/08/2003