G.H.C. Bulletin 23 : Janvier 1991 page 257
EDITORIAL
Outil d'échange, notre bulletin doit être résoluement
ouvert, accueillant et au service de tous. Nous publions
tout ce que nous recevons et nous ne privilégions aucune
région ou île de la Caraïbe, ni aucun thème.
Nous ne voulons pas jouer Anastasie en censurant ou en
sélectionnant les articles, dans la limite, bien sûr, de
la décence, de la courtoisie, de la vérité et de la place
disponible. Par ailleurs ni nos ancêtres, ni l'histoire ne
nous appartiennent; en revanche il nous appartient de les
découvrir, de les comprendre et non d'en travestir ou d'en
occulter tout ou partie.
Il ne faut pas tomber dans le panégyrique béat ni dans
l'anachronisme moral. L'histoire de la Caraïbe s'est faite
avec des hommes et des femmes qui ont ri, qui ont pleuré,
qui ont vécu, maîtres ou esclaves. A nous de comprendre et
de rester indépendants par rapport au sujet observé comme
l'exige toute science.
Un beau mariage et les violences subies par les esclaves
sont deux aspects de l'histoire. Rien de ce qui est humain
ne doit nous être étranger, ni dans le temps, ni dans
l'espace. Or les Caraïbes ont une richesse énorme : carre-
four de quatre races et de la plupart des nations d'Europe
et d'Afrique, elles ont une histoire fragmentée, diffé-
rente et pourtant semblable, entre toutes les îles et les
pays qui les constituent. Ne s'intéresser qu'à un lieu,
une époque ou une famille n'est-ce-pas prendre une pièce,
fusse-t-elle d'or, au lieu du trésor entier ?
L'HISTOIRE A TRAVERS LES REGISTRES PAROISSIAUX
Yvain Jouveau du Breuil
Jean ROYER, natif de Marie Galante, installé depuis 1730
à la Dominique, vint aux Saintes, Terre de Haut, pour se
marier le 16 avril 1745 avec Jeanne Alette GRESSANT. Cet
acte précise que "les bans des dits époux n'ont pas pu
être publiés à Marie Galante attendu le temps fâcheux de
guerre où nous sommes, les voyages ne pouvant se faire
sans un danger évident d'entreprise surtout depuis quel-
ques mois où il y a ici autour, sans cesse, une petite
goëlette anglaise à croiser dont l'expérience ne nous fait
que trop connaître qu'il n'y faut pas s'y fier."
Cet épisode se déroule lors du conflit qui sévissait
depuis fin 1739, entre l'Angleterre et l'Espagne, aux
côtés de laquelle, la France intervint le 17 mars 1744.
L'Angleterre forma alors un blocus autour des Antilles
françaises et seule St Pierre de la Martinique recevait
quelques vaisseaux puissamment escortés par la Royale.
CROISIERE AUX ILES
Arnaud Vendryes
Les Antilles ont, de tout temps, été une destination
idéale pour les croisières. La beauté de leurs paysages,
la douceur de leur climat les recommandent tout particu-
lièrement à ceux qui souhaitent faire un voyage de rêve
sous les tropiques. Comme nous allons le voir, les Anglais
jouèrent dans ce domaine un rôle de précurseurs, en y
introduisant très tôt le tourisme de masse.
"à la Martinique, le 14 août 1747.
Monseigneur,
J'ai eu l'honneur de vous rendre compte par ma lettre
du 12 juillet dernier par la Hollande qu'un corsaire de
cette colonie avait pris un vaisseau sur lequel on avait
embarqué 160 Ecossais qui devaient par ordre du roi être
vendus comme esclaves aux Isles sous le Vent pour avoir
pris les armes pour le prince Edouard.
Deux capitaines et huit autres, tant sergents que
soldats, qui étaient de ce nombre m'ayant demandé de
passer en France par ces bâtiments qui partent sans
convoi, je le leur ai permis, et je vous en rends compte
afin que vous ayez la bonté de donner à leur arrivée dans
les ports les ordres que vous jugerez convenables.
Sur les représentations qu'ils m'en ont faites, j'ai
donné des ordres aux capitaines pour les passer comme
prisonniers de guerre, et je vous écris ainsi (*), dans la
crainte que cette lettre tombant entre les mains des
Anglais, ces malheureux ne fussent reconnus et maltraités.
J'ai l'honneur d'être avec respect, Monseigneur,
Votre très humble et très obéissant serviteur.
DE CAYLUS".
(*) la lettre est chiffrée
extrait de Colonies C/8A/58
Révision 26/08/2003