G.H.C. Bulletin 22 : Décembre 1990 Page 233
ZOEL AGNèS ET EDOUARD ALEXANDRE
(Il faudrait donc y ajouter Marie Joséphine, née en 1822
et morte en 1824). Seul les trois derniers ont donc été
déclarés à la naissance sous le nom de ZOEL AGNèS. On
remarque sur l'acte, outre les signatures des époux
(S.Zoel Agnès et Luce Françoise) et celles des témoins,
celles de Louise Zoel et Félicie Zoel (cette dernière est
peut-être la deuxième fille, Luce Françoise, surnommée
Félicie pour la distinguer de sa mère). Le nom de famille
est donc soit ZOEL AGNèS, soit ZOEL.
Bien entendu, nous avons cherché les baptêmes des
époux.
Au Mouillage de la Martinique (un des deux quartiers
de Saint Pierre, l'autre étant le Fort) on trouve le 23
décembre 1783 le baptême de Zoël Spiridion, mestif, né le
13 (donc erreur de jour sur l'acte de mariage), fils
illégitime de Marie Françoise, "mulâtresse libre comme il
conste par l'acte de son baptême" (hélas! ni date ni
lieu!). Le parrain est Jean Elis mulâtre libre et la
marraine Marie Lier mulâtresse libre.
Les registres des deux paroisses de Saint-Pierre ne
sont conservés que depuis 1763. Nous avons cependant cher-
ché dans les tables le baptême d'une Marie Françoise, sans
en trouver. Nous avons alors cherché son décès, après
1825. Il y en a plusieurs mais avec des prénoms supplémen-
taires ou bien "dite" Agou, Miral, etc. La seule Marie
Françoise, sans autre précision, qui pourrait convenir par
l'âge, est décédée le 3 mars 1833, à 77 ans, rue Levassor,
paroisse du Fort. Mais si les témoins savent qu'elle est
née à Saint-Esprit, fille naturelle, ils ignorent le nom
de sa mère. Les registres de Saint-Esprit ne commençant
qu'en 1758, nous avons arrêté là la recherche d'ascendance
pour cette branche, renonçant donc à savoir si le nom-
prénom AGNèS ajouté aux prénoms de naissance Zoel
Spiridion venait ou non d'une grand-mère.
A Saint-François de Basse-Terre de la Guadeloupe, le
14 décembre 1786, est baptisée Luce Françoise, "petite
mestive d'environ 15 jours", fille de Félicité, mulâtresse
libre. Le parrain est François Aubin fils et la marraine
Céleste Crosnier.
La même recherche a été effectuée pour la mère de
Jean-Baptiste, Thérèse EDOUARD ALEXANDRE (épouse de
Charlemagne ZOEL AGNèS). Là aussi tous les actes sont
répertoriés aux prénoms, devenus nom de famille, EDOUARD
ALEXANDRE. Bien entendu, la recherche était facilitée par
le double nom-prénom dans les deux familles, car des
EDOUARD, des ALEXANDRE ou des AGNèS, il y en a beaucoup.
Première apparition de ce nom double dans les Tables
de Pointe-à-Pitre le 23 février 1822, où Edouard Alexandre
homme de couleur libre, fait transcrire la sentence du
président du tribunal de 1° instance de la ville du 21 du
même mois, homologative de l'enquête du 19, pour constater
la naissance de ses trois enfants.
Le 6 mars de la même année 1822, c'est le mariage de
- Edouard Alexandre, 40 ans, homme de couleur libre, ainsi
qu'il est constaté par sa patente en date du deux octobre
1807, n° 2369, marchand, domicilié en cette ville, natif
du Petit-Bourg, fils légitimé par le mariage de feu
Alexandre, mulâtre libre, et de feu Scholastique, métive
libre, ses père et mère, en date du 29 février 1786 au
Petit-Bourg, et
- Jeanneton, 33 ans, négresse libre (patente du 20 juin
1820, n° 157), native de cette ville et y demeurant, fille
naturelle d'Eulalie, négresse libre, présente.
- les époux présentent 3 enfants : Alexandrine, 6 ans;
Thérèse, 2 ans 1/2; Alexandre, 18 mois, dont la naissance
a été constatée par enquête du 21 du mois dernier, "qu'ils
reconnaissent pour être nés de leur cohabitation hors
mariage, entendant les légitimer par le présent acte
conformément à la loi."
Edouard Alexandre décède dix ans après, le 18 juin
1832, sans avoir eu, semble-t-il, d'autres enfants.
On retrouve bien le mariage de ses parents au Petit-
Bourg , le 21 janvier 1786 :
- Alexandre, mulâtre libre né à Petite Goyave, demeurant
en ce quartier, fils naturel de feu Geneviève, négresse
esclave en son vivant de M. ROUSSEAU, et
- Scolastique, mestif (sic) libre, fille naturelle de
Suzon, née en cette paroisse, avec le consentement de M.
Louis FENETEAU, habitant du quartier, qui signe l'acte.
- Les contractants ont reconnu pour fruit de leurs oeuvres
sous foi de mariage, deux enfants, Sophie, 9 ans, et
Edouard, 5 ans, tous les deux baptisés en cette paroisse.
(précisons que nous n'avons pas trouvé les baptêmes :
faut-il comprendre que Scholastique était alors esclave,
peut-être de Louis FENETEAU ? Rappelons que les registres
des esclaves n'étaient pas recopiés ni envoyés en France)
Le 17 juin 1787, c'est le baptême d'Alexandrine,
fille légitime d'Alexandre et Scholastique, dont le par-
rain est Michel Neau, habitant, et la marraine Marie
Elisabeth Féneteau. Les registres de Petit-Bourg présen-
tant ensuite beaucoup de lacunes pendant la période révo-
lutionnaire, nous n'avons pas continué la recherche.
On voit donc qu'Edouard, fils d'Alexandre, est devenu
Edouard Alexandre et sa descendance a pris le nom
d'EDOUARD ALEXANDRE. La grande majorité des libres de ce
début du XIX° siècle a pour nom le prénom du père, et
parfois, comme ici, du père et du grand-père paternels.
En revanche, lors de l'abolition de l'esclavage de
1848, les officiers d'état civil inventaient des noms pour
ceux qui n'avaient pas de surnom ou d'anciens noms pris
sous la Révolution. Nous avons vu le cas pour les SONGEONS
(GHC page 156).
***
Un autre élément intéressant est à relever dans cette
ascendance, il s'agit du mariage de Charlemagne ZOEL AGNèS
avec Thérèse EDOUARD ALEXANDRE. D'après les tables décen-
nales, il est du 26 mai 1843. Cependant on ne le retrouve
pas dans le registre de 1843, mais dans celui de 1841. En
effet, le 8 février 1843, un tremblement de terre, suivi
d'un gigantesque incendie dû aux feux allumés alors pour
préparer les repas, avait anéanti une grande partie de la
ville de Pointe-à-Pitre, causé de nombreuses victimes et
détruit les registres d'état civil de 1841, 1842 et début
1843. Un arrêté du gouverneur du 7 avril 1843 prescrivit
de retranscrire les actes, sur déclaration des parties
intéressées. C'est donc pourquoi le mariage, célébré le 28
janvier 1841, fut retranscrit le 26 mai 1843, reporté sur
les tables à cette date, mais inclus dans le registre de
1841 refait! C'est le premier des mariages retranscrits.
A ce mariage, le père est prénommé Spiridion ZOEL
AGNèS, ancien négociant. On retrouve ce prénom, qui lui
avait été donné au baptême, au décès de Charlemagne en
1853. Il était aussi cité au décès de sa femme, Luce
Françoise, le 27 août 1828.
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Révision 26/08/2003