G.H.C. Bulletin 12 : Janvier 1990 Page 99
CHIRURGIENS ET MEDECINS AUX ILES
SOUS L'ANCIEN REGIME
H. Voillaume
En envoyant les informations sur Jacques LARTIGUE, chi-
rurgien à Saint-Pierre, publiées dans le n° 9, M. J.
Petitjean Roget ajoutait : "J'ai remarqué que la plupart
des chirurgiens venus à la Martinique au XVII° et début du
XVIII° sont originaires du Sud-Ouest, particulièrement des
Pyrénées, de Bagnères-de-Bigorre. Confirmé ? Explication?"
Mme Voillaume, dont nous avons publié l'article sur le
médecin PEYSSONNEL (n° 7), et qui a trouvé en Guadeloupe
plusieurs médecins originaires de Saint-Gaudens, fait part
ici de remarques concordantes.
Les chirurgiens étaient formés par des parents ou
ils entraient en apprentissage très jeunes chez un chirur-
gien. Très nombreux en France, ils étaient très demandés
par la marine : chaque bateau négrier, chaque navire
marchand ou armé pour combattre embarquait un chirurgien
(de gré ou de force).
Jean André de PEYSSONNEL, médecin du Roy, né à Mar-
seille en 1694, marié au Mont-Carmel de la Guadeloupe
(Basse-Terre), en 1727, accuse les chirurgiens de la Gua-
deloupe d'être des garçons déserteurs de navire très igno-
rants et n'ayant que de mauvaises drogues.
Les chirurgiens sont nombreux aux îles, ils se ma-
rient, ont une descendance. Leur origine, quand elle est
connue, ce qui n'est pas toujours le cas, se situe à La
Rochelle, dans l'Agenais, le Bordelais, et, venant par
Bayonne ou St-Jean-de-Luz, du Pays Basque et de tout le
midi pyrénéen. Sont-ils partis pour fuir les persécutions
religieuses?
Le Béarn, région protestante, fournit un contingent
d'émigrés aux Antilles. Mais de nombreux pyrénéens, pous-
sés par la misère, partaient travailler en Espagne, à
l'époque où l'Espagne recevait de l'or du Nouveau Monde.
D'où une incitation à partir vers les îles. De l'Espagne
partaient nombreux des marins, des artisans, des aventu-
riers.
Marié et fixé aux Antilles, le chirurgien attirait
des parents, des compatriotes. Exerçant divers métiers,
dont la chirurgie, les hommes du Sud-Ouest sont nombreux
aux Antilles. Un relevé des professions liées aux origines
en France serait à faire, aussi exhaustif que possible,
pour vérifier l'hypothèse d'un lien entre le Sud-Ouest et
la profession de chirurgien.
Les docteurs en médecine, peu nombreux en France,
sont peu nombreux aussi aux îles. A bord des navires, il
n'y avait un médecin que lorsqu'il s'agissait d'une impor-
tante escadre.
En France, le médecin appartenait au groupe des nota-
bles et jouissait d'un certain prestige. Souvent fils ou
parent proche ou éloigné de médecin, il avait soutenu une
thèse après plusieurs années d'études. Il était en général
d'un autre milieu socio-économique que celui du chirurgien
Cependant le père de Jean André de PEYSSONNEL, doc-
teur en médecine, a un frère chirurgien de navire. Il est
à remarquer que le père de Jean André est l'aîné, son
frère chirurgien est un cadet. Jean André préparait au
doctorat son fils aîné. Celui-ci fut terrassé par la
maladie de Siam.
J.A. de PEYSSONNEL décède à l'Anse-Bertrand, en Gran-
de-Terre. Après lui, peu de médecins sont cités jusqu'au
début du XIX° siècle : c'est dans le premier tiers de ce
siècle qu'un groupe important de médecins, venant de Gas-
cogne, se marient aux îles. Ils ne cesseront d'augmenter
au cours de ce siècle mais les origines seront variées.
Au prestige de Montpellier, Toulouse, Aix, va succé-
der le prestige de Paris. Paris et Bordeaux fourniront de
nombreux docteurs en médecine au cours du XIX° siècle et
la profession se transforme radicalement au XX° siècle.
QUELQUES MEDECINS EN GUADELOUPE
A LA FIN DU XVIII°
B. et Ph. Rossignol, Y. Jouveau du Breuil
Les registres d'enregistrement du Conseil Souverain
de la Guadeloupe conservés aux Archives départementales de
Gourbeyre (série 1B 1740-44; 1768-69; 1770-72; 1774-75)
contiennent les enregistrements de cinq lettres de méde-
cins, en latin.
1B2 (53 V° à 57 V°) 2 1 1769 : André BERBAS (de Condom),
Bordeaux 27 9 1764
1B4 (426 R° à 428 R°) 13 11 1770 : Dominique CASEAUX (de
Campan, diocèse de Tarbes), Bordeaux 11 4 1769
1B4 (480 V° à 484 R°) 8 1 1771 : Guillaume MAURY "Castro-
coesariensi dix Montalanensis apud occitanos" (Castelsar-
rasin dans le Tarn-et-Garonne) Montpellier 5 8 1768
1B4 (547 V° à 549 V°) 4 9 1771 : Pierre BELOST ("matisco-
nensis" : de Mâcon) Nancy 12 4 1771
1B5 (619 R° à 621 V°) 11 11 1775 : François LAGOANèRE "e
loco Manciet diocesis Auscitane" (Manciet dans le Gers),
Bordeaux 9 11 1769
Nous en avons retrouvé trois :
André BERBAS, docteur en médecine domicilié à Petit-Bourg,
né à Condom, paroisse St-Pierre (Gers) fils d'Arnaud et
Thérèse SAINT-PAU, épouse le 25 5 1784, à Baie-Mahaut,
Elisabeth CHABERT de LA CHARRIèRE, majeure, née au Bail-
lif, fille d'Hilaire Louis, écuyer, chevalier de St-Louis,
lieutenant-colonel d'infanterie, ci-devant commandant du
bataillon du Baillif, et de Marguerite ANQUETIL CAVALIER
(Elisabeth est une des soeurs du futur député à la Consti-
tuante). André BERBAS décède à Baie Mahaut sur l'habita-
tion de son beau-frère M. PAUL, le 3 janvier 1793; il est
âgé de 45 à 48 ans, docteur en médecine et habitant du
Gosier.
Pierre BELOST, docteur en médecine à Basse-Terre, né à
Cluny diocèse de Mâcon en Bourgogne, fils de Théodore,
bourgeois de Cluny, et Catherine DEBIAT, épouse à Vieux-
Habitants, le 16 février 1773, Marguerite Rose LESUEUR,
fille de Pierre, capitaine de milice et habitant, et Anne
Claire BONNETEAU. C'est le seul BELOST à avoir laissé une
descendance, éteinte avec Marie Antoinette Louise Cina qui
épousa en 1833 Jean Baptiste Nicolas Léonce LESUEUR.
Son frère Antoine, maître chirurgien à Basse-Terre (nous
ne savons pas qui est l'aîné), avait épousé à Baie-Mahaut,
le 4 février 1767, Marie STEEL, fille d'un négociant
protestant originaire de l'île Saint-Christophe, qui se
remariera avec Louis de CURT, autre député à la Consti-
tuante (étude en cours). Il est dit docteur en médecine en
1784, au mariage de sa fille avec Louis SEGRETIER. Il
décéda à Basse Terre (St François) le 12 4 1774 âgé de 37
ans.
Un neveu des deux précédents, François BELOST, natif de
Notre Dame de Cluny, fils de Louis, négociant à Cluny, et
Ursule Pelgre LESPINETTE, était aussi maître chirurgien.
Il épousa aux Vieux Habitants le 28 Avril 1791 Marie
Jeanne BILLERY, fille de Charles, officier de milice et
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Révision 26/08/2003